Le monument de l’écriture dans l’œuvre d’Alain Nadaud

Par Gianluca Chiadini — Mémoire, mémoires et réminiscence

Le lecteur des romans d’Alain Nadaud (1948―2015) est poussé à devenir l’archéologue et le philologue des documents anciens, quoique fictifs, mentionnés dans les romans, ainsi qu’à devenir le philosophe en quête de leur origine (arkhé)[1]. À ce titre, la notion de roman philosophique-archéologique a été formulée pour l’œuvre d’Alain Nadaud, d’une part, par la structure de ses romans, qui se présentent exclusivement sous forme de documents, et, d’autre part, par la quête philosophique de l’arkhé[2].

C’est par le biais de la quête archéologique et philosophique qu’Alain Nadaud considère son activité d’écrivain comme celle d’un architecte, d’un urbaniste, d’un archéologue et d’un philosophe. En remarquant que son écriture est le résultat d’un tel procédé, Nadaud soutient, en conséquence, l’idée que son œuvre est un monument, dont les éléments et la structure lui parviennent inévitablement du passé. Ainsi, dans cet article, nous réfléchirons à l’idée nadaldienne d’écriture littéraire en tant que monument[3]. Nous nous mettrons d’abord en quête des sources historiques et philosophiques à retrouver notamment dans l’œuvre de l’historien Jacques Le Goff et des philosophes Jacques Derrida et Paul Ricœur, qui nous aideront à comprendre les circonstances à partir desquelles les sujets philosophiques et historiques de l’œuvre d’Alain Nadaud prennent vie. Nous viserons à mettre en évidence le fait que la notion de monument est le catalyseur du principe nadaldien selon lequel l’écriture littéraire ne peut naître que de ses liens avec les textes du passé. En effet, d’après Nadaud, c’est le passé qui guide la main de l’écrivain afin que son œuvre tombe dans le vertige temporel de la fiction littéraire[4]. Car, une fois dépassé l’instant spatio-temporel de sa création, l’écriture littéraire garde sa mémoire à travers le temps, comme si elle était un monument de n’importe quelle ville au passé millénaire.

Le document, le monument et la trace

Les sources historiques et philosophiques nous donnent les paramètres nécessaires pour comprendre le sens de l’écriture philosophique-archéologique d’Alain Nadaud, mais aussi pour soutenir le principe de l’écriture littéraire en tant que monument. D’abord, il faut rappeler les mots de Jacques Le Goff à propos des deux notions de document et de monument :

La parola latina monumentum va ricollegata alla radice indoeuropea men che esprime una delle funzioni fondamentali della mente (mens), la memoria (memini). Il verbo monere significa « far ricordare », donde « avvisare », « illuminare », « istruire ». Il monumentum è un segno del passato. Il monumento, se si risale alle origini filologiche, è tutto ciò che può richiamare il passato, perpetuare il ricordo. […] Il termine latino documentum, derivato da docere « insegnare », si è evoluto verso il significato di prova[5].

Le sens du monument se trouve entièrement dans sa racine philologique, qui remonte au latin. Le monument est le lieu par excellence de la mémoire. Le document est l’objet historique qui enseigne quelque chose du passé et en devient donc la preuve. La distinction de sens entre les notions de monument et de document n’exclut cependant ni l’un ni l’autre. En effet, Le Goff lui-même parvient à la conclusion selon laquelle les deux notions de document et de monument se superposent :

Il documento è monumento. È il risultato dello sforzo compiuto dalle società storiche per imporre al futuro ― volenti o nolenti ― quella data immagine di se stesse. Al limite, non esiste un documento–verità. Ogni documento è menzogna. Sta allo storico il non fare l’ingenuo[6].

Jacques Le Goff annihile ainsi l’idée de l’objectivité du document en raison de sa tendance à manipuler l’avenir. À savoir, les documents sont comme des témoins dissimulant les faits réels au profit de l’image et de l’idée que les hommes du passé ont voulu donner d’eux-mêmes. Tout document est donc un monument car son but est de manipuler et de contrôler dans l’avenir la mémoire qu’on aura des faits du passé.

C’est la même idée avancée par Ricœur qui, dans le troisième tome de son œuvre Temps et récit (1985), invite à réfléchir notamment à la relation entre document et monument, refusant, lui aussi, une vraie distinction entre les deux et acceptant le même principe remarqué par Le Goff. Il écrit : « Il faut alors dire, avec Le Goff, que, une fois démystifiée sa signification apparente, “le document est monument”[7] ». Malgré leur étymologie différente, l’un lié à la notion de mémoire et l’autre au principe de l’enseignement qui se fait finalement preuve, le document et le monument sont deux notions tout à fait superposables. Car le document est la trace que toute société veut laisser d’elle dans l’avenir. Dans la toile d’araignée de l’enquête historique, il ne reste à l’historien qu’à dévoiler les pièges du passé sans avoir confiance en l’objectivité des documents et des monuments qui constituent les fils de cette toile. En somme, c’est l’historien qui passe au crible la fiabilité des documents avant d’en faire les éléments privilégiés de la mémoire du passé, car l’idée de leur objectivité est utopique. Ricœur regrette la confiance actuelle dans les documents en tant que preuves des faits historiques :

Dans la notion de document, l’accent n’est plus mis aujourd’hui sur la fonction d’enseignement, que l’étymologie du mot souligne (quoique de l’enseignement au renseignement la transition soit aisée), mais sur celle d’appui, de garant, apporté à une histoire, un récit, un débat. Ce rôle de garant constitue la preuve matérielle, ce qu’en anglais on appelle « évidence », de la relation qui est faite d’un cours d’événements. Si l’histoire est un récit vrai, les documents constituent son ultime moyen de preuve ; celle–ci nourrit la prétention de l’histoire à être basée sur des faits[8].

Dans ce passage, Paul Ricœur dénonce la confiance faite aux documents en tant que preuves de faits historiques. Le philosophe, en acceptant la thèse de Jacques Le Goff, repousse l’idée selon laquelle le document pourrait être une preuve toujours évidente pour l’historien. En outre, il confirme que le monument est une présence valable au profit de la mémoire collective du peuple qui le conserve :

Ce qui rendait le monument suspect, en dépit du fait qu’il était bien souvent trouvé in situ, c’était sa finalité affichée, la commémoration d’événements jugés par les puissants dignes d’être intégrés à la mémoire collective. En revanche, le document, bien qu’il fût collecté et non hérité directement du passé, paraissait posséder une objectivité qui s’oppose à l’intentionnalité du monument, laquelle est proprement édifiante. Les écrits d’archives étaient ainsi réputés être plus documents que monuments[9].

Selon le philosophe, la distinction catégorique entre l’objectivité supposée du document et la valeur commémorative et édifiante du monument est inacceptable. Toutefois, la thèse d’une différence nette entre le document et le monument a engendré, parmi les historiens du passé, l’idée fausse selon laquelle les écrits d’archives seraient uniquement des documents sans être aussi des monuments.

Le principe de l’identité des notions de document et de monument se remarque entre les lignes chez le philosophe Jacques Derrida, lorsqu’il traite de la notion de trace et de l’acte de l’archivage de documents :

Incrustons une deuxième citation dans l’exergue. […] Inscrivant encore l’inscription, elle commémore à sa manière, en effet, une circoncision. Ce monument très singulier, c’est aussi le document d’une archive. De façon réitérée, il laisse la trace d’une incision à même la peau : plus d’une peau, à plus d’un âge. À la lettre ou par figure. La stratification feuilletée, la surimpression pelliculée de ces marques cutanées semble défier l’analyse. Elle accumule autant d’archives sédimentées dont certaines sont écrites à même l’épiderme d’un corps propre, d’autres sur le support d’un corps « extérieur ». Sous chaque feuille s’ouvrent les lèvres d’une blessure, pour laisser entrevoir la possibilité abyssale d’une autre profondeur promise à l’excavation archéologique[10].

Jacques Derrida compare l’exergue à la circoncision. L’exergue, en tant que trace, est le document archivé ainsi que le monument de la mémoire collective qui s’est stratifiée au fil du temps. Le document et le monument sont donc les traces appartenant au système complexe des couches de l’excavation archéologique[11].  Le document et le monument sont vestiges du passé et symboles de la mémoire collective dans le temps du présent ainsi qu’en vue de l’avenir[12]. C’est le même état que celui de la trace, qui est temporellement hybride. Car la trace, d’une part, appartient au passé pour ce qui est de l’instant de sa création, et de l’autre, elle marque le présent et surtout essaie de contrôler d’avance l’avenir. En effet, le document, le monument et la trace sont les catalyseurs privilégiés de la mémoire collective[13]. En résumé, ils sont les signes du passé autant que de la mémoire vivant dans le présent et en vue de l’avenir.

En conséquence, le document et le monument ne restent pas enfermés dans les instants temporels de l’histoire du passé, dans laquelle ils ont été engendrés. Ils tendent infiniment vers le temps futur de la mémoire de la postérité. En effet, étant donné que l’avenir d’une telle mémoire est indéterminé, à savoir sans une fin déterminable, on peut considérer le temps du document et du monument comme éternel. Pour autant, la durée indéterminée et indéterminable de la mémoire de la postérité engage le document du passé, qui tend éternellement vers l’avenir grâce à sa fonction de monument. Il faut remarquer enfin que le monument est le document de la mémoire de la société, qui reconnaît en eux son identité. Le document et le monument sont les traces d’un passé auquel on reconnaît du sens historique et de la valeur symbolique, qu’il faut préserver dans le présent et transmettre dans le futur. Cette préservation et cette transmission sont réalisées afin que la durée indéterminée et indéterminable du document et du monument dans le futur puisse donner l’illusion de l’éternité au peuple qui y reconnaît son identité.

L’écriture littéraire en tant que monument

Nous avons analysé la notion de monument d’une perspective philosophique, mais nous savons que les monuments sont surtout des lieux historiques. Les monuments d’un passé lointain sont souvent des bâtiments à la structure très articulée par la présence de plusieurs éléments architectoniques[14], même décoratifs, réalisés au cours de plusieurs siècles[15] ainsi que des lieux caractérisés par une stratigraphie archéologique complexe[16]. L’exemple par excellence de ces lieux historiques peut être la ville de Rome et son histoire millénaire. Son emplacement est stratifié de plusieurs couches archéologiques. Ses bâtiments historiques ont été souvent réalisés avec des marbres de spoliation et la plupart d’entre eux ont été édifiés en suivant les modèles stylistiques de l’âge ancien. Il en est de même pour plusieurs villes historiques autour de la Méditerranée. Parmi elles, citons Tunis, située au sud de la Méditerranée et héritière de l’ancienne Carthage, où Alain Nadaud a choisi de vivre. Ses couches archéologiques et ses monuments lui ont peut-être démontré la validité de sa vision métaphorique de l’écriture littéraire en tant que monument.

Alain Nadaud a signé le récit Exegi Monumentum en 2010[17]. Le titre fait écho à l’incipit de l’Ode III, 30 d’Horace, le poète latin du siècle d’Auguste[18]. Horace y célèbre la puissance de la poésie, grâce à laquelle la gloire du poète triomphera pour l’éternité. En effet, la poésie est le monument qui survivra davantage que les pyramides et qui, plus fort que l’airain, n’aura rien à craindre de l’action destructrice du temps et de la nature. Alain Nadaud évoque explicitement le début de l’ode et pourtant, dans la note correspondant à la citation, il ne mentionne pas Horace, mais seulement Ovide et Alexandre Pouchkine. Dans l’épilogue de ses Remedia Amoris (v. 811–814), Ovide reprend les vers d’Horace et souligne le principe de l’éternité du nom du poète grâce à la mémoire qu’en conserveront les lecteurs admirateurs de son œuvre car guéris des peines d’amour[19]. Ovide constate les bénéfices apportés par son poème à ses lecteurs. En conséquence, le souvenir de son nom chez eux sera éternel. Alexandre Pouchkine a composé son poème intitulé Exegi monumentum (1836), évidemment inspiré des vers d’Horace. Le poète russe affirme que son œuvre est un monument plus grand que celui du Tsar Alexandre, et éternel tant qu’un autre poète lit ses vers[20]. Alexandre Pouchkine remarque, comme Horace, l’analogie de l’œuvre poétique en tant que monument. Dans son cas, le bâtiment est un temple, dont le poète cite le fronton et la colonne. On peut donc affirmer que son poème est sacré comme le temple qu’il évoque.

Le titre du récit d’Alain Nadaud, qui évoque l’incipit de l’ode du poète de Venosa et mentionne les noms d’Ovide et d’Alexandre Pouchkine, témoigne de la volonté de l’écrivain français de présenter son œuvre comme le monument ultérieur par rapport à ceux qui lui ont précédé. C’est comme si Alain Nadaud créait son récit sur les couches archéologiques conservant les traces des poèmes analogues d’Horace, d’Ovide et d’Alexandre Pouchkine. Car, d’après Nadaud, l’écriture littéraire se nourrit toujours du passé au point que l’auteur écrive comme sous la dictée du passé :

C’est que l’écriture me tombe dessus. Elle surgit comme ça sans prévenir. Je ne suis qu’une main qui écrit, comme sous la dictée. Comme si à force de ratures et de brouillons, il m’appartenait de mettre au jour la forme d’un livre qui me préexistait[21].

Le court-circuit temporel est à l’origine de l’écriture d’Alain Nadaud. L’intertextualité[22] est fondamentale dans la réalisation de son monument. L’auteur fictif du récit Exegi monumentum, derrière qui se cache Alain Nadaud lui-même, parle de son œuvre comme si elle était un bâtiment enrichi des vestiges du passé et édifié sur les couches archéologiques d’autres siècles poétiques et artistiques. Ces vestiges ont été mutilés par la spoliation fictive orchestrée par l’écrivain, même s’ils continuent à parler d’eux-mêmes au lecteur qui est contraint de devenir l’archéologue en quête de leur histoire. Par exemple, dans le cas du titre Exegi monumentum, c’est comme si l’écrivain, en tant qu’auteur du récit, avait oublié volontairement le nom d’Horace afin que le lecteur, en tant qu’archéologue, puisse le retrouver par le biais de ses recherches philologiques et archéologiques. En outre, le lecteur est invité à se mettre en quête des poèmes similaires d’Ovide et d’Alexandre Pouchkine dont les noms sont évoqués dans la note du titre du récit d’Alain Nadaud.

Le récit de Nadaud a été créé en réutilisant les vestiges du passé que l’auteur fictif déploie sur deux niveaux temporels différents. D’une part, ils forment les traces du passé dont il faut dévoiler l’histoire millénaire. De l’autre, ils constituent les marques de sens nouveaux, qui leur sont attribués dans le temps du présent. Il s’agit de l’hybridité temporelle de la trace que nous avons évoquée précédemment. Les deux niveaux temporels des vestiges sont les deux faces du document et du monument. Le premier niveau temporel est constitutif de leur structure, qui a traversé les siècles. Le second est lié à l’usage qu’on en fait dans le temps du présent et surtout à ce qu’on en fera dans l’avenir.

En ce qui concerne la structure archéologique, même architectonique, de l’écriture, l’auteur fictif du récit est clair :

Mais je suis payé de ma peine quand je tombe sur des lambris sculptés, encore en place sur les murs de prestigieuses demeures ; c’est que leurs salons ont jadis connu la fortune en gloire. Faute d’entretien, la toiture a cédé en premier. Au point où elles en sont, il serait dommage de ne pas récupérer ce qui peut l’être. S’il ne tenait qu’à moi, je les disposerais d’autre façon, à seule fin de voir l’effet décalé, en trompe-l’œil, que ça donne : pierres de fondation, chapiteaux sculptés de figure naïves, panneaux ornés des héros de la mythologie, icônes serties d’or fin, poutres gravées de citations latines et grecques, fresques à motifs religieux, mosaïques effritées, vieilles ferrailles philosophiques, théorèmes mathématiques, concepts d’un autre âge, miroirs sans tain[23].

L’écrivain lui-même est devenu archéologue et amateur des antiquités. En effet, il se sert de la métaphore de la spoliation et de l’assemblage des vestiges des bâtiments du passé pour expliquer au lecteur sa méthode de création littéraire. Cette méthode prévoit de créer un ensemble mêlant les matériaux archéologiques et l’évocation des textes philosophiques, mathématiques et des « concepts d’un autre âge ». C’est la méthode littéraire d’Alain Nadaud dite de l’architexture, c’est-à-dire du texte considéré comme s’il était identique à un monument historique ou parfois au centre historique d’une ville millénaire. L’architexture est tissée avec les éléments extraits de textes du passé et d’autres éléments choisis dans l’œuvre existante de l’écrivain[24]. L’architexture ainsi créée devient tellement complexe que même son auteur avoue se perdre dans « ces architextures hétéroclites[25] ». Le caractère hétéroclite de l’architexture, c’est-à-dire du monument de l’écriture, est le résultat de la volonté de Nadaud d’architecturer son œuvre, en pillant les vestiges du passé, afin qu’ils deviennent les structures historiques et fictionnelles de ses romans et récits[26] :

Libre à moi de les apparier […] avec d’autres éléments narratifs : planches tirées de vieilles encyclopédies, manuscrits enluminés, nomenclatures surréalistes, cartes marines, copies de bas–reliefs, urne funéraire tirée d’une nécropole alexandrine, bustes d’empereurs ou de poètes, alphabets indéchiffrés, […] bref, tout un bric-à-brac de pensées fugaces, de fausses citations, de coq-à-l’âne, de sophismes et paradoxes, de vagues angoisses […]. À plusieurs reprises, mes ouvrages s’inspirent de certaines constructions bien connues de l’Antiquité. Dans un cas je n’hésite pas à recycler les marbres d’une immense basilique d’origine byzantine, aux coupoles ornées de mosaïques en pâtes de verre et lapis-lazuli ; dans l’autre, j’emprunte divers matériaux à ce temple jadis le plus célèbre de toute la côte d’Asie mineure et qu’incendia Érostrate. Mais ce sont plus encore les verrières qui me fascinent et m’inspirent, en particulier celle de la grande galerie du Jardin des Plantes[27].

Les vestiges du passé, ainsi évoqués par l’auteur fictif d’Exegi monumentum, ont été réutilisés afin de donner naissance aux monuments fictifs de l’œuvre d’Alain Nadaud. En effet, la « basilique d’origine byzantine » est une allusion au roman L’iconoclaste[28] (1989), dont l’intrigue a été imaginée par Nadaud aux siècles de l’iconoclastie à Byzance. Le « temple le plus célèbre de toute la côte d’Asie mineure » allude à La mémoire d’Érostrate[29] (1992), où est racontée l’histoire de l’incendiaire du temple d’Artémis à Éphèse au ive siècle av. J.-C. « L’urne funéraire d’une nécropole alexandrine » est une allusion à Archéologie du zéro, où Nadaud met en scène la découverte de la dernière cachette de la secte des « Adorateurs du zéro » à Alexandrie en Égypte au viie siècle. Les « bustes d’empereurs ou de poètes » alludent à Auguste fulminant[30] (1997), où on découvre l’histoire de l’empoisonnement de Virgile de la main des poètes Lucius Varius Rufus et Plotius Tucca qui exécutent la volonté de l’empereur Octavien Auguste. Enfin, les « alphabets indéchiffrés » sont une allusion à Désert physique[31] (1987), qui retrace les journées de fouilles effectuées en quête des tablettes cunéiformes de la bibliothèque fictive de Sakkyah-Iptah. Alain Nadaud fait de son écriture un monument historique réalisé par le biais du pillage des vestiges du passé, tant réels que fictifs. En effet, Nadaud a révélé explicitement que la quête des textes du passé est à l’origine de sa création littéraire :

Je perds un temps fou à courir d’une librairie à l’autre à la recherche d’ouvrages depuis longtemps épuisés ou dont jamais personne n’a entendu parler. Mais cette chasse-là, en dépit de ses multiples déconvenues, garde quelque chose d’excitant pour l’esprit, et d’irremplaçable pour la gestation du livre en cours[32].

D’après Alain Nadaud, l’écriture littéraire ne peut être qu’une réécriture réalisée sur les traces des textes du passé de façon à leur donner une vie nouvelle dans le temps du présent. L’architexture est notamment le lieu où on peut tisser ces textes dans le contexte nouveau, qui s’en empare et fonde sur eux son identité nouvelle. Dans l’architexture, le texte, en tant que monument, est semblable à une église ancienne ou à un palais historique, riche de colonnes, de statues et de marbres anciens, et bâti sur des couches archéologiques, qui témoignent des civilisations précédentes. La quête quasi obsessionnelle de Nadaud des documents du passé afin de réaliser son écriture découle de leur puissance iconique. En effet, c’est la puissance des documents et des monuments que l’écrivain s’est appropriée. Ils aident la persistance de sa mémoire dans l’avenir ainsi que la reconnaissance de la valeur de son œuvre par la postérité. Raison pour laquelle l’auteur fictif d’Exegi monumentum se pose à la fin la question de l’exécrable possibilité que personne ne vienne visiter son architexture : « Si personne ne vient se pencher sur leur rambarde, à quoi donc aura servi la construction de ces immenses balcons donnant sur l’improbable[33] ? » Ce serait la chose la plus affreuse pour un écrivain, car ce dernier serait condamné à la disparition à cause de son absence dans la mémoire collective de la postérité. Le résultat serait que le monument perdrait son état de document et de monument, en restant finalement un objet vide de sens. Dans ses romans et récits, Nadaud a toujours insisté sur l’importance de la mémoire collective par rapport à l’idée du monument de l’écriture. Les poètes Lucius Varius Rufus et Plotius Tucca, dans Auguste fulminant, empoisonnent Virgile afin de sauver l’Énéide, que le poète de Mantoue aurait voulu détruire. Clermont de Chartrette, dans Si Dieu existe[34] (2007), écrit sa Vita Anselmi, par ailleurs non autorisée par l’Anselme, protagoniste du roman, afin de pérenniser son nom d’écrivain en opposition à Eadmer de Canterbury, le vrai biographe de saint Anselme. Le but est toujours le même : écrire de façon à survivre à l’effacement provoqué par le temps, même s’il faut accepter la vérité improbable de la fiction littéraire.

Dans le récit La disparition, du recueil de nouvelles Voyage au pays des bords du gouffre[35] (1986), Alain Nadaud imagine que les quartiers de la ville de Londres sont la métaphore de la conscience du protagoniste, l’écrivain juif Jacob Maslaveck. En effet, ce dernier parcourt les rues de Londres comme s’il était en quête de lui-même. En conséquence, les quartiers qu’il connaît le rassurent, lui donnant la preuve de son existence. Les quartiers qui lui sont inconnus symbolisent le lieu de sa disparition, qui peut survenir par la volonté du narrateur fictionnel et de l’écrivain de la nouvelle. Les rues, les bâtiments de la ville et leurs architectures sont comme les pages d’un roman. Tant qu’ils existent, les personnages et l’écrivain existent. Lorsqu’on franchit le bord du gouffre, tout disparaît, même le texte et son auteur.

La pulsion irréductible d’écrire, de faire de son œuvre fictive un monument plus véritable que la vie même, est aussi la conséquence de la lecture par Alain Nadaud de l’œuvre du poète argentin Jorge Luis Borges[36] :

Quand s’approche la fin, il ne reste plus d’images de souvenir ; il ne reste plus que des mots. Il n’est pas étrange que le temps ait confondu ceux qui une fois me désignèrent avec ceux qui furent symboles du sort de l’homme qui m’accompagna tant de siècles. J’ai été Homère ; bientôt, je serai Personne, comme Ulysse ; bientôt, je serai tout le monde : je serai mort[37].

C’est la conclusion du récit L’Immortale de l’écrivain argentin. Ce passage met l’accent sur la puissance des mots, ceux de la littérature, capables de franchir les barrières du temps et de l’espace dans l’esprit du lecteur ainsi que dans celui de l’écrivain. Car la littérature est le monument qui maintient toujours vive la mémoire de soi, même au-delà des bornes de la réalité. En effet, cette dernière est périssable. La fiction littéraire n’a aucune limite temporelle ni spatiale et est donc en mesure de préserver la mémoire de l’écriture, en tant que monument, pour l’éternité. Alain Nadaud a été un lecteur avide de l’œuvre de Jorge Luis Borges, dont il a suivi le principe de fiction littéraire car considérée comme plus véritable que la réalité même. Ce principe se lie à l’idée de l’écriture en tant que monument, car c’est son caractère fictionnel qui lui donne la possibilité d’être impérissable et de ne jamais laisser tomber dans l’oubli la mémoire de n’importe quel écrivain qui la lui confie.

Conclusion

Il faut remarquer d’abord que, d’après Nadaud, l’œuvre littéraire est considérée comme une trace temporellement hybride, car elle est le résultat des textes du passé, qui, revitalisés par l’écrivain dans le temps de son présent, sont destinés ainsi à durer dans l’avenir. Dès lors, le texte littéraire est le monument dont le but est la conservation de la mémoire de l’écriture. C’est la raison pour laquelle Alain Nadaud, inspiré par les poèmes d’Horace, d’Ovide et d’Alexandre Pouchkine, écrit à son tour le récit Exegi monumentum. Il y affirme que le travail de l’écrivain est identique à celui de l’archéologue et de l’architecte, car tous utilisent les vestiges du passé afin de les préserver ainsi que de se préserver eux-mêmes et leurs œuvres dans l’avenir. L’œuvre de Nadaud prend donc la forme de l’architexture, à savoir la forme d’une structure à la fois archéologique et architectonique. Car l’œuvre littéraire ne peut être que le monument dont les vestiges représentent l’arkhé. En effet, ce sont les vestiges qui rendent possible la réalisation de l’œuvre et sa conservation en tant que lieu de la mémoire. On en conclut que l’œuvre littéraire est un monument qui, en traversant les siècles, vit entre la fiction et la réalité ainsi qu’au-delà des limites spatio-temporelles de son auteur. Dès lors, il ne reste à ce dernier qu’à se soumettre à la majesté d’un tel monument afin de lier son nom à l’éternité, à laquelle l’œuvre littéraire appartient inévitablement car elle est bâtie sur et avec les vestiges du passé.

Gianluca Chiadini

Biobibliographie

Gianluca Chiadini est professeur d’histoire de l’art occidental au lycée « Publio Virgilio Marone » à Avellino, près de Naples. Spécialiste de l’archéologie classique (Master en Archéologie à l’Université de Naples « Federico II » et Doctorat en Étruscologie à l’Université de Rome « La Sapienza »), de l’histoire de l’art occidental et de la littérature française contemporaine (Master ès Langues à l’Université de Naples « Federico II »), il tisse des liens entre littérature, philosophie, art et sciences de l’histoire dans « l’extrême contemporain » de la littérature française. Fin connaisseur de l’œuvre de l’écrivain français Alain Nadaud, il est l’auteur des essais Alain Nadaud. L’écrivain philosophe (Aracne, Rome, 2020) et Il romanzo “archeologico” in Francia. Il caso di Auguste fulminant di Alain Nadaud (Aracne, Rome 2019). En outre, il est l’auteur de l’essai en forme d’article Lo sguardo melancolico sulla rovina secondo Jean Starobinski, inséré dans les Annali de l’Université de Naples « L’Orientale », section langues romances LXI (2), 2020.

Bibliographie

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Notes

[1] Archéologie du zéro (1984), L’envers du temps (1985), Désert physique (1987), L’Iconoclaste (1989), La mémoire d’Érostrate (1992), Le livre des malédictions (1995), Auguste fulminant (1997), La fonte de glace (2000), Si Dieu existe (2007) et Le passage du col (2009) sont les romans les plus représentatifs de l’œuvre d’Alain Nadaud.

[2] Gianluca Chiadini, Il romanzo “archeologico” in Francia. Il caso di Auguste fulminant di Alain Nadaud, Saggi di letteratura francese e comparata 2, Roma, Aracne, 2019, p. 41–58. Gianluca Chiadini. Alain Nadaud. L’écrivain philosophe, Saggi di letteratura francese e comparata 4, Roma, Aracne, 2020, p. 13–27, 53–74.

[3] Alain Nadaud, « Exegi Monumentum », La Revue Littéraire, n° 46 (mai 2010), p. 11–37.

[4] Alain Nadaud, D’écrire j’arrête, Saint-Benoît-du-Sault, Tarabuste, 2010, p. 20–21.

[5] Jacques Le Goff, « Documento/monumento », dans Enciclopedia Einaudi, tome 5, Torino, Einaudi, 1978, p. 38. « Il faut rapporter le mot latin monumentum à la racine indoeuropéenne men, qui exprime une fonction fondamentale de l’esprit (mens), la mémoire (memini). Le verbe monere signifie “faire rappeler”, d’où “prévenir”, “éclairer”, “instruire”. Le monumentum est un signe du passé. Le monument, alors qu’on remonte à son origine philologique, est tout ce qui peut évoquer le passé, perpétuer la mémoire. […] Le mot latin documentum, filiation de docere “enseigner”, a évolué vers le sens de preuve ». On souligne que la traduction en français est de l’auteur de cet article.

[6] Ibid., p. 46. « Le document est monument. Il est le résultat de l’effort accompli par les sociétés historiques pour imposer à l’avenir ― de gré ou de force ― une certaine représentation d’elles–mêmes. Cas limite, le document–vérité n’existe pas. Tous les documents représentent des mensonges. Le travail de l’historien consiste à ne pas être naïf ». On souligne que la traduction en français est de l’auteur de cet article.

[7] Paul Ricœur, Temps et récit. Le temps raconté, tome 3, Paris, Seuil (Points), 1985, p. 215.

[8] Ibid., p. 213–214.

[9] Ibid., p. 215.

[10] Jacques Derrida, Mal d’archive, Paris, Galilée, 1995–2008, p. 39.

[11] Gianluca Chiadini, « La réception des notions philosophiques de trace, d’arkhé et de document dans l’œuvre d’Alain Nadaud », Labirinth, n° 22/2 (hiver 2020), p. 95.

[12] Paul Ricœur, Temps et récit. Le temps raconté, op. cit., p. 217–220.

[13] Gianluca Chiadini, « La réception des notions philosophiques de trace, d’arkhé et de document dans l’œuvre d’Alain Nadaud », art. cit., p. 97.

[14] Ce sont les lieux de mémoire par excellence, car les éléments architectoniques du passé (colonnes, reliefs, sculptures) en augmentent et consolident la valeur symbolique dans le présent. À ce propos, Pierre Nora écrit : « Moins la mémoire est vécue de l’intérieur, plus elle a besoin de supports extérieurs et de repères tangibles d’une existence qui ne vit plus qu’à travers eux. D’où l’obsession de l’archive qui marque le contemporain, et qui affecte à la fois la conservation intégrale de tout le présent et la préservation intégrale de tout le passé ». Pierre Nora, « Entre Mémoire et Histoire. La problématique des lieux », dans Pierre Nora [dir.], Les lieux de mémoire, tome 1, Paris, Gallimard (Quarto), 1997, p. 30.

[15] Pensons, par exemple, à Villa Médicis à Rome. Le bâtiment de la Renaissance a été réalisé sur les ruines des Horti Sallustiani et sa façade est enrichie de plusieurs reliefs de la Rome ancienne.

[16] Pensons, par exemple, au col du Capitole à Rome. Ses plusieurs couches archéologiques témoignent de l’histoire de Rome dès ses origines au viiie siècle avant J.-C. jusqu’à l’ère moderne.

[17] Alain Nadaud, « Exegi Monumentum », art. cit., p. 11–37.

[18] « Exegi monumentum aere perennius / regalique situ pyramidum altius, / quod non imber edax, non Aquilo impotens / possit diruere aut innumerabilis / annorum series et fuga temporum. / Non omnis moriar multa quae pars mei / vitabit Libitinam: usque ego postera / crescam laude recens… » (Horace, Odes III, 30, v. 1–8). « J’ai achevé un monument plus que l’airain durable / et plus que la royale vétusté des pyramides élevé / que ni les pluies dévoreuses ni l’Aquilon effréné / ne sauraient démolir et ni le nombre incalculable / des années enchaînées et ni la fuite des instants / non entier je ne mourrai une grande partie de moi / échappera à Libitine : continuellement par la suite / je renaîtrai par les louanges… » , texte traduit par Danielle Carlès, [en ligne]. https://www.fonsbandusiae.fr/spip.php?article327 [Site consulté le 28 septembre 2021].

[19] « Hoc opus exegi: fessae date serta carinae; / contigimus portus, quo mihi cursus erat. / Postmodo reddetis sacro pia vota poetae, / carmine sanati femina virque meo. » (Ovide, Remedia Amoris, v. 811–814). « J’ai achevé cette œuvre ; ornez de guirlandes de fleurs mon navire fatigué. / Nous touchons enfin le port où je voulais aborder. / Femmes et hommes que mon poème a guéris, / un jour, vous rendrez au poète de pieuses actions de grâce. » La traduction est de l’auteur de cet article.

[20] « J’érige un monument qui n’est pas de main d’homme. / L’herbe n’obstruera pas au peuple son sentier. / Son fier fronton ira plus haut que la colonne / du Tsar Alexandre Premier. / Je ne mourrai pas tout, puisqu’au corps de ma lyre / mon âme intacte chante, échappant au trépas. / Je serai connu, tant qu’au sublunaire empire / fut-ce un seul poète vivra. » (Alexandre Pouchkine. Exegi monumentum, traduit par André Piot, v. 1–8), [en ligne]. https://ruverses.com/alexander-pushkin/exegi-monumentum/1947/ [Site consulté le 28 septembre 2021].

[21] Alain Nadaud, D’écrire j’arrête, op. cit., p. 20–21.

[22] C’est une allusion à l’œuvre de Gérard Genette, Palimpsestes. La littérature au second degré, Paris, Seuil, 1982.

[23] Alain Nadaud, « Exegi Monumentum », art. cit., p. 19–20.

[24] Alain Nadaud inaugure son idée d’architexture dans le texte présenté par Rosa Galli Pellegrini « Architexture », Publif@rum Études, n° 2 (2005), [en ligne]. https://www.publifarum.farum.it/index.php/publifarum/article/view/26 [Site consulté le 28 septembre 2021]. Le texte est une archictexture, car il a été pensé par son auteur « comme un texte second qui relierait l’ensemble de ses textes ». On peut considérer ce texte comme la page d’un petit journal intime, où Alain Nadaud fait le bilan général de son œuvre, en tissant le fil logique qui relie l’ensemble de ses romans, récits et essais.

[25] « À la fin, je me perds moi-même dans ces architextures hétéroclites ». Alain Nadaud, « Exegi Monumentum », art. cit., p. 21.

[26] Le philosophe italien Giorgio Agamben remarque que l’art, en tant que poíesis, est par excellence architectonique, car elle marque l’espace originel (arkhé) des vivants. À cet égard, voir Giorgio Agamben, L’uomo senza contenuto, Quodlibet (Quodlibet Bis), [1994] 2013, p. 153–155.

[27] Alain Nadaud, « Exegi Monumentum », art. cit., p. 20, 30–31.

[28] Alain Nadaud, L’iconoclaste, Paris, Quai Voltaire, 1989.

[29] Alain Nadaud, La Mémoire d’Érostrate, Paris, Seuil, 1992.

[30] Alain Nadaud, Auguste fulminant, Paris, Grasset, 1997.

[31] Alain Nadaud, Désert physique, Paris, Denoël, 1987.

[32] Alain Nadaud, Ivre de Livres, Paris, Balland, 1989, p. 60.

[33] Alain Nadaud, « Exegi Monumentum », art. cit., p. 37.

[34] Alain Nadaud, Si Dieu existe, Paris, Albin Michel, 2007.

[35] Alain Nadaud, Voyage au pays des bords du gouffre, Paris, Denoël, 1986, p. 103–114.

[36] La lecture des œuvres de Jorge Luis Borges a été fondamentale pour Alain Nadaud. À cet égard, voir Gianluca Chiadini, Il romanzo “archeologico” in Francia. Il caso di Auguste fulminant di Alain Nadaud, op. cit., p. 157–166.

[37] Jorge Luis Borges, L’Aleph et autres contes. El Aleph y otros cuentos, traduit par Roger Caillois et René L.F. Durand, Paris, Gallimard (Folio bilingue), 2018, p. 63.

Mémoire, mémoires et réminiscence

Revue Chameaux — n° 13 — hiver 2023

Dossier

  1. Présentation du numéro

  2. Comment Giorgio Vasari façonne-t-il le mythe et la mémoire des artistes de la Renaissance italienne au moyen d’outils rhétoriques picturaux et textuels ?

  3. L’histoire revisitée des tirailleurs sénégalais. La mémoire franco-africaine de la Grande Guerre dans le roman français contemporain : le cas de L’Indigène de Jean-Denis Clabaut

  4. Le monument de l’écriture dans l’œuvre d’Alain Nadaud

  5. Quand les mémoires s’opposent : l’influence de la langue sur les réceptions de Nègres blancs d’Amérique de Pierre Vallières

  6. Mythisation littéraire du génocide rwandais et construction d’un imaginaire de résilience

  7. Quand l’être devient mystère de l’oubli dans les récits de Beckett

Hors-dossier

  1. Sur la soi-disant neutralité de la technique

  2. Colloque Femmes de lettres 2021 – Virginia Woolf : pour un engagement féministe indirect

  3. Colloque Femmes de lettres 2021 – « Et cela me regarde » : l’engagement de l’écriture de Marguerite Duras dans « Sublime, forcément sublime Christine V. »

  4. Colloque Femmes de lettres 2021 – Les légitimités de l’engagement chez Annie Ernaux, des entretiens à Monsieur le Président

  5. Colloque Femmes de lettres 2021 – « Hypersext » : Hypertexte, cyborgs, et poésie postpornographique

  6. Colloque Femmes de lettres 2021 – « The Most Irresponsible And Dangerous Movie Of The Year» : étude de la réception du film Detroit et du cinéma politique de Kathryn Bigelow