Dormir, la lune dans un œil et le soleil dans l’autre
Les piscines d’Heshbôn comme deux astres de regard
Un amour dans la bouche, des colombes derrière le voile
Parée comme les champs, les bois et la mer
Avant que souffle la brise du jour
Tu es belle, ma bien-aimée
Belle et parée comme le tour du monde
Lève-toi, viens, fuis à travers les paysages
Car voilà l’hiver passé en fumée parmi les branches
Toi, baiser des baisers de ta bouche
Huile qui constelle au désir
Et s’épanche comme on abolit la distance
Reviens, reviens, Sulamite
Reviens, que nous te regardions
Beauté, reddition inconditionnelle, brèche faite à soi-même
Le dernier souci sur un visage transformé
***
Ma pensée est couleur de lumières lointaines
Aux flamboyants juins d’or, pleins de relents, lassés
Arbres évaporant des parfums opiacés
Comme pour y chercher une image qui flotte
Sous les lustres dont les étoiles vont versant
Dans l’azur cérébral leurs vols blancs, bruns, et gris
Image sur image, ainsi combien joyeux
J’ai gardé dans mon âme un coin de vieille terre
Qui porte en elle un ciel de printemps auroral
J’ai toujours adoré, plein de silence, à vivre
Ces musiques vibrant comme un éveil de flots
Dans la sérénité de ces exils terrestres
Aux pays de la brume, aux landes du soleil
À vouloir dérober le céleste Trésor
Les cieux ont mené leurs valses astrales
Tout s’éveille alourdi de nocturnes extases
Se mêlant aux reflets d’un ciel pur et rougi
Cette marche dont la caresse
Allume de points d’or les blanches solitudes
***
Mon âme a la candeur d’une chose étoilée
Dont les hilarités féroces
Rages de fifre ou de tambour
Qui, galopant, vainqueur des batailles solaires
En des ouragans de délire
Trouble le rêve lent des oiseaux solitaires
***
Le soir, hanté de rêves nébuleux
J’aime à m’inoculer de bizarres musiques
Ton clair rire d’émail écarlate
S’élance en tendresse affolée
D’un golfe où le soleil abaisse ses antennes
On dirait des dragons en galopade au bourg
Vers des assauts de ville aux tours de bronze et d’or