La valeur du présent seule rallume la valeur du passé et l’inverse n’est guère le cas.
— Pierre Vadeboncœur, Un génocide en douce
Un triste constat mine inlassablement la société québécoise depuis plusieurs années : l’histoire du Québec n’est presque pas enseignée. Au collégial, seulement 2 424 étudiants (sur un total de 153 000 élèves) ont suivi un cours d’histoire du Québec en 2008-2009, nous apprend Marie-Andrée Chouinard1 dans un article du quotidien Le Devoir. À mon avis, une telle faiblesse dans l’enseignement affecte lourdement la formation d’un individu ; en effet, comment celui-ci, ayant pour seul bagage historique le cours d’histoire du secondaire2, en arrivera à comprendre son rôle de citoyen dans une société et poser des gestes responsables qui découlent d’un certain recul ? Fernand Dumont disait à juste titre de l’histoire qu’elle est « la faculté d’un individu de se situer dans le temps et, par conséquent, de le survoler d’une certaine manière3 ». Cette faille dans l’enseignement découle d’un problème plus profond qui affecte la société québécoise depuis le début des années 1980 : il s’agit du « décentrement » de toute une génération face au temps et à l’histoire. Élevée en pleine Révolution tranquille, soit dans une époque marquée par le rejet de son passé et le désir de rattrapage, la génération qui émerge au début des années 1980 se réclame d’un présent inatteignable : « Ce décentrement face à l’Histoire […] entraîne généralement un désarroi générationnel, comme si, faute d’idéal passé ou futur, l’individu contemporain […] était condamné à une sorte d’éternel présent et ne pouvait imaginer s’inscrire durablement dans l’histoire4. » Les jeunes d’aujourd’hui, vivant dans une société submergée de valeurs corrélées au présent et à l’immédiateté, de par la grande avancée des technologies « intimistes » (téléphone intelligent, etc.), se trouvent par conséquent encore plus « décentrés ». Dans ces conditions, l’histoire du Québec, si peu enseignée, n’a qu’une résonance minime auprès des jeunes qui ont, littéralement, la tête ailleurs. La littérature et l’art en général devraient, à mon avis, pouvoir pallier ces failles dans l’éducation des nouvelles générations et offrir à celles-ci un autre regard. Je propose, dans la continuité du dernier numéro de Chameaux, « Ce que peut la littérature », le cinéma de Pierre Perrault (1927-1999 – cinéaste, poète, écrivain, homme de radio) en tant que réponse face à ce désarroi. Comme nous le verrons un peu plus loin, son cinéma est exemplaire d’une sensibilité épique et didactique qui implique un rapport au temps et à la connaissance particulier : non seulement tributaire du présent, puisque tournée en direct, son œuvre s’attache également à retracer une certaine tradition épique et légendaire, dans le but de transmettre aux générations futures un savoir près de se perdre.
Dans son ouvrage Esthétique et théorie du roman, Mikhaïl Bakhtine consacre une partie au genre épique et au phénomène de sa « romanisation ». La pierre de touche du genre épique est selon lui le concept de « passé absolu » qui érige autour du genre une sorte de barrière temporelle et axiologique. Or, cette distance épique n’exclut pas qu’une forme épique « contemporaine » nous ait été transmise puisque, selon Bakhtine,
les chants épiques héroïsants à la gloire des contemporains (qui nous sont accessibles et parfaitement réels) sont nés d’une tradition épique ancienne et puissante après que fut créé le récit épique. Ils transfèrent sur les événements et les hommes de leur temps une forme épique accomplie, autrement dit, ils transfèrent sur eux la forme chronotopique du passé, les font participer au monde des « pères », des « commencements », des « sommets », ils les canonisent, en quelque sorte, de leur vivant5.
Ces considérations impliquent que la forme épique contemporaine, que je propose de nommer sensibilité épique, très présente chez Perrault, travaille une œuvre dans ses rapports au temps et à l’histoire. Michèle Garneau a étudié ce phénomène chez Perrault du point de vue de l’interpénétration des genres : « On observe un tel transfert poétique dans les cycles cinématographiques de Perrault. Le cinéaste ne procède pas seulement à des ‘‘canonisations’’ vivantes, mais ‘‘en direct’’. […] Le passé n’est plus absolu, mais localisé dans un processus historique réel, corrélé au présent et au futur. [.] Pour la suite du monde, c’est rendre le passé au présent et la mémoire à l’avenir6. » Pour certains critiques des années 1960-1970, l’œuvre de Perrault était passéiste et idéalisait le savoir traditionnel. Au contraire, par sa sensibilité épique, Perrault présente des événements tournés en direct, donc fortement ancrés dans un présent, mais qui s’attachent à décrire et revivre un passé – celui des « pères », des « ancêtres » – pour les générations futures. « Bien entendu, nous pouvons percevoir ‘‘notre temps’’ comme héroïque et épique en nous plaçant du point de vue de sa signification historique, à distance, comme vu de loin dans le temps (non pas loin de nous, les contemporains, mais à la lumière de l’avenir) ; et le passé peut être perçu de façon familière (comme notre présent)7 », continue Bakhtine. Cette sensibilité épique est manifeste dans l’œuvre de Perrault ; qu’on pense seulement à son film le plus populaire, Pour la suite du monde : « En exprimant le fleuve grâce au marsouin, je ne proposais pas un retour à la terre mais une vision du monde, un héritage culturel, le commencement de nous-mêmes8 », mentionne d’ailleurs Perrault dans une discussion avec Fernand Dumont et Michel Brûlé. Ce film, qui présente des événements et des personnages « réels », accomplit donc une canonisation en direct d’hommes qui « relèvent » la pêche à marsouins de leurs « pères », de leurs « ancêtres », pour la suite du monde. La même sensibilité se retrouve un peu partout dans le cinéma de Perrault, notamment dans l’un des films du cycle amérindien, Le pays de la terre sans arbre, qui superpose des images de chasse tournées dans le présent du film aux paroles de vieux Amérindiens et Amérindiennes, qui racontent d’anciennes légendes de chasse du Mouchouânipi. Également constitutive de la sensibilité épique pour Bakhtine, la légende nationale se trouve à l’origine de la plupart des productions de Perrault. Selon le théoricien russe, elle se situe à la base de l’épopée et ne peut être que collective : « La source de l’épopée, écrit celui-ci, c’est la légende nationale (et non une expérience individuelle et la libre invention qui en découle)9. » Chaque cycle de Perrault s’attaque à certains aspects de ce qu’on pourrait nommer effectivement « la légende nationale » : la chasse aux marsouins dans le cycle de l’Isle-aux-Coudres, la terre et la colonisation dans le cycle abitibien, le monde des Amérindiens du Nord du Québec et leur chasse au caribou dans le cycle amérindien, la forêt et la chasse à l’orignal dans La bête lumineuse ainsi que le fleuve Saint-Laurent et Jacques Cartier dans La grande allure et Les voiles bas et en travers. De plus, tous ces films découlent effectivement d’une création « collective », même si Pierre Perrault reste l’auteur de ses œuvres. Pour bien comprendre sa démarche artistique, il faut le voir comme une sorte d’aède ou de rhapsode10 qui initie l’œuvre et donne la parole à des hommes qu’il réunit autour d’une même circonstance, d’une même légende : « C’est l’humanité qui m’intéresse. C’est elle qui prend la parole. Je m’efface devant cette parole inédite. Je refuse d’en être l’auteur11 », dira Perrault. Stéphane-Albert Boulais, l’un des personnages de ses films, corrobore cette idée et insiste sur la polyphonie de l’œuvre de Perrault : « Avec son cinéma vécu, Pierre Perrault a donné la parole à des non-acteurs, permettant ainsi à ces individus de développer avec lui une littérature à plusieurs voix. Les personnages de ce cinéma ont la parole, ils énoncent, et leurs énoncés servent de matériau brut au métalangage pratiqué par le cinéaste au moment du montage12. » À cet égard, le générique des films est intéressant : Perrault n’apparaît jamais comme le seul auteur de ses films ; les artisans, que ce soit le caméraman, le preneur de son ou le monteur, y figurent aussi :
Et je n’en finirais pas de dire comment Michel Brault m’a aidé à vaincre les techniques encore défaillantes, jusqu’à quel point Bernard Gosselin savait écouter même les silences, l’entêtement de Martin Leclerc toujours à son meilleur dans les situations difficiles. Et le son qui a l’air d’aller de soi quand le film est terminé, mais qui a besoin de merveilles d’ingéniosité de la part des Marcel Carrière, Serge Beauchemin, Claude Beaugrand, Yves Gendron. Et que dire de la patience et de l’intelligence des monteurs […].
Il faut savoir payer ses dettes, car aucun film n’est possible sans ces collaborations. Chacun des artisans d’un film participe à la réalisation. Même si c’est le réalisateur souvent qui en tire le plus de crédit. Injustement13.
Pierre Perrault reste en premier lieu un poète ; il travaille la parole vive de ses personnages pour monter ses films, et ensuite il reprend cette matière brute pour la « refondre » dans ses écrits. Ce cycle, de la parole vers l’écriture ou de la parole aux actes (titre d’un recueil d’essais de Perrault), est primordial chez lui. D’où les nombreuses retranscriptions de ses films (ses scénarios commentés), qui témoignent de sa méthode de création14, ou ses essais, qui s’inspirent des paroles de personnages et de situations tirées de son œuvre filmique.
Dans un texte maintenant bien connu et commenté, le philosophe du cinéma Gilles Deleuze s’est attardé aux dimensions collectives et politiques du cinéma de Perrault, œuvre et écrivain qu’il inscrit dans ce qu’il appelle une littérature « mineure ». Il mentionne entre autres qu’en pays minoritaire (le Québec dans le Canada), devant cette absence15 de peuple, l’auteur « n’est pas en état de produire des énoncés individuels qui seraient comme des histoires inventées ; […] l’auteur est en situation de produire des énoncés déjà collectifs, qui sont comme les germes du peuple à venir, et dont la portée politique est immédiate et inévitable […]16 ». Perrault, qui effectivement initie une parole qui parle au nom de tout le Québec, prend la légende comme source collective de son œuvre, qu’il retrouve dans la parole de ses personnages : « Il reste à l’auteur la possibilité de se donner des ‘‘intercesseurs’’, c’est-à-dire de prendre des personnages réels et non fictifs, mais en les mettant eux-mêmes en état de fictionner, de légender, de fabuler17. » Deleuze a également bien cerné ce rapport vécu face au passé dans l’œuvre de Perrault : « Procédant par mise en crise, Perrault va dégager l’acte de parole fabulateur […] mais toujours de telle façon que la fabulation soit elle-même mémoire, et la mémoire, invention du peuple […]. Non pas le mythe d’un peuple passé, mais la fabulation du peuple à venir18. » La sensibilité épique chez Perrault, qui, je le rappelle, initie un rapport « vécu » face au passé épique et légendaire, se retrouve dans une œuvre peu commentée en ce sens19 : il s’agit de La bête lumineuse20. Tourné à l’automne 1980 dans la région de Maniwâki dans l’Outaouais, ce film s’intéresse à un groupe de chasseurs d’orignal, qui, chaque année, pendant une semaine, se retirent au Michomiche (« le lieu où les ancêtres chassaient »), ancien « campe » de chasse appartenant à des Amérindiens, pour y chasser l’orignal. Accompagnés d’un ami et guide amérindien, Barney, ils tenteront de tuer la bête « lumineuse », l’orignal. La sensibilité épique de cette œuvre est manifeste à la lecture de l’introduction de Perrault dans son scénario commenté21, publié en 1982. Son titre, « Note pouvant servir de préface à propos du titre de ce film pour dire mes regrets de ne pas l’avoir nommé les pocailles de Maniwâki », permet de constater que cette introduction sert à justifier le projet de Perrault. Les « pocailles22 de Maniwâki » (le nom que se donnent les chasseurs du film), auraient été selon Perrault « les mots les plus aptes à décrire le film qui nous est arrivé » (BL-11). Il s’agit bien sûr d’un film sur la chasse à l’orignal, mais surtout d’un portrait « épique » des pocailles, ces gens qui « ne fréquentent que la corde raide. [Qui] vivent au superlatif. [Qui] changent en exploit le plomb vil de la misère quotidienne. » (BL-7) Il a voulu nous les proposer, ces « engagés du grand portage […], ces hommes qui cherchaient ailleurs, au plus loin et même dans la dérision d’une vie à gages, mercenaire, le pays qu’on venait de leur dérober » (BL-12). On retrouve ici, en filigrane, plus qu’un écho à Menaud maître-draveur de Félix-Antoine Savard, une filiation, une « délignée », comme l’aurait dit Perrault : « On les a délogés de l’histoire. Ils en ont gardé une obsession du royaume comme un mal à l’âme : terrible force à dilapider. Durant des siècles ils ont chevauché le voyage. Ils se nommaient eux-mêmes les voyageurs13 » (BL-12), continue Perrault. Cette introduction sert de prétexte à Perrault pour se justifier, mais également pour affilier son œuvre et ses personnages (qu’il se plaît à magnifier, à grandir) à la légende, celle de la chasse, de la forêt, de l’orignal : « J’ai bien vite compris que l’orignal n’est pas seulement une bête à tuer pour en filmer la chasse ou pour passer le temps, mais une bête à aimer, à légender, à réciter pour justifier la forêt et cette incroyable retraite fermée de quelques hommes qui s’enferment dans son mythe pour en parler et, à travers la bête lumineuse comme une robe prétexte, pour se vider le cœur sur le dos de l’amitié. » (BL-15) La chasse est pour Perrault lieu de légende, « des bottes lacées », celles des « pères », des « ancêtres » ; un lieu de mémoire, où l’homme québécois peut revivre la geste ancienne de la chasse, « dans ce pays de la Gatineau que leur père a dravé, dans ce pays du Michomiche où les ancêtres des Indiens chassaient » (BL-19). La dimension épique est ici patente : en premier lieu, des hommes refont la chasse à l’orignal en direct (le rapport présent, « vécu » face au passé). Ensuite, cette chasse est constitutive de la « légende nationale », celle de la forêt des draveurs, de Menaud, et de la chasse à l’orignal (à cet égard, l’une des premières images du film est celle d’une peinture rupestre d’un orignal, peint sur un gros rocher). Finalement, l’œuvre est collective en ce sens qu’elle est un espace polyphonique, entretissé de plusieurs voix, et surtout, qu’elle semble au final s’adresser à tout un peuple (ce qui en revient aux considérations de Deleuze), comme en témoignent les deux dernières phrases de l’introduction de Perrault, à propos de la révélation de son film : « Et c’est cette révélation que je voudrais pouvoir partager avec d’autres du même bois, si on m’en donne la permission, pour nous grandir tous d’autant et nous reconnaître aussi de même souche. Enfin. » (BL-21)23
Pour en revenir au problème de départ, la pauvreté de l’enseignement de l’histoire du Québec au collégial, il faut rappeler que toute l’entreprise de Perrault, qui a pris forme autour des années 1960 et de la Révolution tranquille, consistait à récuser le rejet unilatéral du passé des Québécois24. Pour Perrault, le cinéma était un outil de rencontres mais surtout de connaissance, qui lui permettait de façon presque infaillible de rendre compte de la réalité québécoise. « J’ai toujours prétendu que mes films s’efforçaient de partager une connaissance bien plus qu’à raconter une histoire ou à donner un spectacle25 », dit-il en entrevue. Toute son œuvre cinématographique est donc riche en enseignements, tournée vers un savoir fragile, incertain, dépositaire d’une longue tradition sur le point de changer. Il ne cache pas la dimension didactique de son cinéma : « À mes yeux, il ne suffit pas de faire de belles images (c’est cela qui importe à la fiction), mais il est essentiel pour le documentaire qui se respecte de donner du sens aux images. Je n’appartiens pas à l’Office national du coucher de soleil26. » Par contre, loin de vouloir donner un sens arrêté à ce qu’il montre, Perrault oppose souvent grâce à son montage les points de vue de manière dialectique pour amener le spectateur par lui-même à la connaissance. Michèle Garneau, au sujet du cycle abitibien, mentionne que « Perrault attache à ce qui est montré une valeur exemplaire ; il transforme le fait en exemple, à la fois célébration (exaltation) et enseignement (modèle). Perrault est […] un grand pédagogue27. » La plupart des films de Perrault s’attardent patiemment aux artisans, aux personnes qui exercent un travail qui découle d’une longue tradition, souvent passée d’homme à homme, de génération en génération. En témoigne, entre autres, Les voitures d’eau, qui s’intéresse à la construction des goélettes de l’Isle-aux-Coudres et au savoir des artisans, appelés à disparaître avec l’arrivée des bateaux de fer mécaniques ; même constat dans les films du cycle abitibien où Perrault filme avec attention Cyrille Labrecque, ancien défricheur de la première génération arrivée en Abitibi dans les années 1930, qui s’acharne encore à défricher sa terre (images de cet « ancêtre », ce défricheur, qu’il oppose à des images de reboisement, effectué par le gouvernement) ; et dans La bête lumineuse, Barney, lAmérindien qui accompagne le groupe, est souvent filmé, respectueusement, en train par exemple de fabriquer avec de l’écorce de bouleau un « câll », ou de dépecer un animal au couteau. Perrault, toute sa vie, s’est donc acharné à faire connaître l’homme québécois, l’oublié des écritures, selon lui. Son œuvre entière, qui parcourt de long en large le territoire du Québec, est riche de rencontres et d’enseignements qui, à mon avis, proposent de façon honnête une mémoire vivante et vécue du Québec à « ‘‘la vaste majorité des techniciens, des médecins, des ingénieurs, des journalistes ou des artistes récemment diplômés ou en voie de l’être [qui] n’ont eu ou n’auront eu pour toute formation historique et civique’’ que les cours d’histoire du secondaire28 ». Perrault voulait ainsi, par son cinéma et toute son entreprise artistique, contrer l’espèce d’amnésie collective qu’il sentait gagner le Québec. Son œuvre témoigne donc d’une entreprise qui pose l’art comme un véritable engagement, ayant une prise directe avec la réalité, pour que les Québécois s’identifient et se reconnaissent dans ce qui leur est montré. Cette reconnaissance n’en est pas une de complaisance et de folklore, mais bien plutôt de fierté, fortement liée au présent du spectateur : voilà ce que nous étions et ce sur quoi nous devons bâtir pour le futur. L’art devrait, à mon avis, et peut-être aussi selon Pierre Perrault, servir de liant collectif pour un peuple, lui enseignant ce qu’il a été et le stimulant pour la suite des choses. Un peuple sans Histoire, pour conclure avec Pierre Vadeboncœur, est un peuple inférieur : « La culture d’un peuple, sa langue, ses façons d’être, doivent avoir le maximum de cohésion possible et le maximum de dignité. Une personne, un peuple, déculturés, sont une personne, un peuple psychologiquement diminués, infériorisés. Ils ne se sentent plus eux-mêmes ni supérieurs, ni même le moindrement égaux à des personnes, à des peuples, dont la culture et les moyens linguistiques sont forts et cohérents […]29. »
Bibliographie
- BAKHTINE, Mikhaïl, Esthétique et théorie du roman, Paris, Gallimard (Tel), 1987, 488 p.
- BIRON, Michel, François DUMONT et Élizabeth NARDOUT-LAFARGE, Histoire de la littérature québécoise, Montréal, Boréal, 2007, 689 p.
- BOULAIS, Stéphane-Albert, « Le cinéma vécu de l’intérieur. Mon expérience avec Pierre Perrault », mémoire de maîtrise en lettres françaises, Université d’Ottawa, 1988, 269 f.
- BRÛLÉ, Michel, Fernand DUMONT et Pierre PERRAULT, « De la notion de pays à la représentation de la nation », dans Cinéma Québec, vol. 1, mai 1971, p. 22-27.
- CHOUINARD, Marie-Andrée, « Enseignement de l’histoire. Il était une fois. », dans Le Devoir, 26 novembre 2010, p. A8.
- DELEUZE, Gilles, L’image-temps, Paris, Minuit (Critique), 1995, 378 p.
- DUMONT, Fernand, Fernand Dumont, un témoin de l’homme, Montréal, L’Hexagone (Entretiens), 2000, 356 p.
- GARNEAU, Michèle, « Ce qui nous rattache au temps : le réveil du passé chez Pierre Perrault et Fernand Dumont », dans Michèle Garneau et Johanne Villeneuve (dir.), Traversées de Pierre Perrault, Montréal, Fides (Nouvelles Études québécoises), 2009, p. 109-138.
- ___, « La dynamique épique dans le cinéma de Pierre Perrault », dans Robert Dion, Frances Fortier et Élizabeth Haghebaert (dir.), Enjeux des genres dans les écritures contemporaines, Québec, Nota Bene (Cahiers du Centre de recherche en littérature québécoise), 2001, p. 293-310.
- LAFOREST, Daniel, « Le rhapsode du direct : Pierre Perrault et la formation du poète déterritorialisé », dans Michèle Garneau et Johanne Villeneuve (dir.), Traversées de Pierre Perrault, Montréal, Fides (Nouvelles Études québécoises), 2009, p. 213-233.
- PERRAULT, Pierre, Cinéaste de la parole : entretiens avec Paul Warren, Montréal, L’Hexagone (Entretiens), 1996, 342 p.
- ___, La bête lumineuse, Montréal, Nouvelle Optique, 1982, 251 p.
- ___, « Pierre Perrault par lui-même », dans Québec Français, no 38, mai 1980, p. 38-48.
- VADEBONCŒUR, Pierre, To Be or Not to Be. That Is the Question !, Montréal, L’Hexagone, 1980, 169 p.
- ___, Un génocide en douce : écrits polémiques, Montréal, L’Hexagone / Parti pris (Aspects), 1976, 190 p.
Notes de bas de page
- Marie-Andrée Chouinard, « Enseignement de l’histoire. Il était une fois… », dans Le Devoir, 26 novembre 2010, p. A8.
- Présentement, au Québec, à l’école secondaire publique, le seul cours d’histoire du Québec obligatoire est celui de 4e secondaire.
- Fernand Dumont, Fernand Dumont, un témoin de l’homme, Montréal, L’Hexagone (Entretiens), 2000, p. 294.
- Michel Biron, François Dumont et Elizabeth Nardout-Lafarge, Histoire de la littérature québécoise,Montréal, Boréal, 2007, p. 533. Le terme « décentrement », à mon avis, traduit bien l’état de la société québécoise du début des années 1980 : une époque marquée par la défaite référendaire, l’échec constitutionnel et la crise économique. Les Québécois de cette époque se sentent donc « décentrés », privés des repères vitaux des décennies antérieures : « Tous ces décentrements (par rapport à la nation, à l’Histoire, à la France, à la religion catholique, à la littérature elle-même) se ramènent peut-être au fond à un seul, qui est celui du sujet individuel lui-même », mentionnent les auteurs d’Histoire de la littérature québécoise, à la page 534.
- Mikhaïl Bakhtine, Esthétique et théorie du roman, Paris, Gallimard (Tel), 1987, p. 450.
- Michèle Garneau, « La dynamique épique dans le cinéma de Pierre Perrault », dans Robert Dion, Frances Fortier et Elizabeth Haghebaert (dir.), Enjeux des genres dans les écritures contemporaines, Québec, Nota Bene (Cahiers du Centre de recherche en littérature québécoise), 2001, p. 299.
- Mikhaïl Bakhtine, op. cit., p. 450.
- Michel Brûlé, Fernand Dumont et Pierre Perrault, « De la notion de pays à la représentation de la nation », dans Cinéma Québec, vol. 1, mai 1971, p. 27.
- Mikhaïl Bakhtine, op. cit., p. 449.
- Voir à ce sujet l’article de Daniel Laforest, « Le rhapsode du direct : Pierre Perrault et la formation du poète déterritorialisé », dans Michèle Garneau et Johanne Villeneuve (dir.), Traversées de Pierre Perrault,Montréal, Fides (Nouvelles Études québécoises), 2009, p. 213-233.
- Pierre Perrault, Cinéaste de la parole : entretiens avec Paul Warren, Montréal, L’Hexagone (Entretiens), 1996, p. 17.
- Stéphane-Albert Boulais, « Le cinéma vécu de l’intérieur. Mon expérience avec Pierre Perrault », mémoire de maîtrise en lettres françaises, Université d’Ottawa, 1988, f. III.
- Pierre Perrault, op. cit., p. 58.
- Perrault confie en entrevue qu’il retranscrit l’intégralité de ce qu’il a tourné en plus de commenter : « Oui. je transcris les dialogues. même ceux pour lesquels je n’ai pas d’images. Et aussi mes impressions. Et souvent ma mémoire des situations, de l’ambiance, du contexte [.]. Petit à petit le film se fait tout seul dans ma tête. En passant par la main du copiste. » (Pierre Perrault, op. cit, p. 76-77.)
- Perrault mentionne dans plusieurs entrevues qu’il a commencé à s’intéresser au Québec et aux Québécois parce que ceux-ci n’avaient aucune représentation dans les arts, et que lui-même ne les connaissait pas. Il dit en 1980, dans un autoportrait : « Nous [les Québécois] étions pauvres en écriture. Donc nous n’avions que fort peu de livres pour nous lire. Et pourtant nous apprenions à vivre en lisant. J’ai fait un constat d’ignorance. Je ne connaissais que l’écriture. Je ne savais rien des hommes et de la géographie. Tout était à recommencer. » (Pierre Perrault, « Pierre Perrault par lui- même », dans Québec Français, no 38, mai 1980, p. 39.)
- Gilles Deleuze, L’image-temps, Paris, Minuit (Critique), 1985, p. 288.
- Ibid, p. 289.
- Ibid, p. 290.
- Michèle Garneau a surtout relevé la dimension épique du cycle abitibien.
- Pierre Perrault, La bête lumineuse, Montréal, Nouvelle Optique, 1982, 251 p. Désormais, les renvois à cette édition seront signalés dans le corps du texte par le sigle BL- suivi du numéro de la page.
- Perrault a publié le scénario commenté de six films. Ces scénarios, publiés après la sortie des films, retranscrivent les dialogues des films, auxquels Perrault ajoute des notes et des commentaires.
- « […] mot québécois formé de black eye (anglais) et du français œil poché qui est devenu poqué, du vieux français pocques désignant les marques de la toupie à clous sur le bois », nous apprend Pierre Perrault (BL-11).
- Dans ces deux cas, c’est l’auteur qui souligne.
- Michèle Garneau l’a d’ailleurs bien montré : « Refus global, rejet violent, discrédit, abjection, dégoût sont autant de réflexes de défense ou d’affects identifiés pour parler du rapport au passé des nouveaux Québécois de la Révolution tranquille. » (« Ce qui nous rattache au temps : le réveil du passé chez Pierre Perrault et Fernand Dumont », dans Michèle Garneau et Johanne Villeneuve [dir.], op. cit., p. 115.)
- Pierre Perrault, Cinéaste de la parole, op. cit, p. 82.
- Ibid., p. 68.
- Michèle Garneau, « La dynamique épique dans le cinéma de Pierre Perrault », loc. cit., p. 301.
- Tiré de Se souvenir et devenir, rapport du Groupe de travail sur l’enseignement de l’histoire, cité dans l’article de Marie-Andrée Chouinard, art. cit., p. A8.
- Pierre Vadeboncœur, To Be or Not to Be. That Is the Question !, Montréal, L’Hexagone, 1980, p. 58.