Le présent continue. L’histoire du roman par Claude Simon

Par Xavier Phaneuf-Jolicoeur — Mensonge et littérature

Révolution : Mouvement d’un mobile qui, parcourant une courbe fermée, repasse successivement par les mêmes points.

Exergue, tiré du dictionnaire Larousse, de Claude Simon, Le Palace, 1962.

Sur des pistes tortueuses – Dépeignant une démarche d’écriture que l’on ne peut qu’associer à la sienne, alors qu’il donne son Discours de Stockholm en 19851, Claude Simon (1913-2005) évoque un chemin « frayé à grand-peine », « qui se recoupe fréquemment, repasse par des carrefours déjà traversés », une voie suivant laquelle « il peut arriver qu’on soit ramené à la base de départ, seulement plus riche d’avoir indiqué quelques directions, jeté quelques passerelles » (DS, p. 902). Lorsque l’on s’y arrête, il semble que cette description puisse aussi caractériser la manière dont s’organise la pensée simonienne de l’histoire du roman, parfois « instable, incohérente, discontinue », ouverte à la « fiction », comme peuvent l’être les histoires littéraires d’écrivains2, mais ménageant, à travers ses tensions et contradictions, une continuité secrète, tandis que s’y croisent et s’y emboîtent constamment le passé, le présent et l’avenir.

Lorsqu’il aborde l’art et le roman d’un point de vue historique, Simon rappelle fréquemment un mot de Harold Rosenberg : « la tradition en art c’est “la tradition du nouveau3” ». Dans le même esprit, il réitère son opposition à l’emploi, dans le domaine artistique, du terme « progrès (dans le sens d’une marche vers un mieux ou un meilleur) », préférant observer, plutôt, des « différences », des « évolutions4 ». Partant de ces réflexions, de ces diverses notions – progrès, tradition, nouveauté –, j’interrogerai les manières dont se structure et se dynamise la conception simonienne de l’histoire du roman. Je procéderai d’abord à une analyse de la relation que Simon entretient avec la tradition, plus complexe que ne le laisse croire a priori la formulation de certaines de ses prises de position. Ensuite, je montrerai l’importance que l’histoire littéraire simonienne accorde au présent, temps de l’insatisfaction qui nourrit l’écriture. J’envisagerai enfin l’avenir du roman selon Simon : ouvert et appelant à un constant renouvellement.

Faire autrement

Plus jamais comme avant – En traversant certains des nombreux textes – articles, entretiens, discours – où Claude Simon esquisse son histoire littéraire, on peut avoir l’impression diffuse, malgré les nuances et les explications, qu’il envisage une rupture assez radicale entre les romans du passé – traditionnels ou conventionnels5 – et les romans nouveaux, qui auraient échappé aux lacunes et aux aveuglements des premiers. C’est ce qui se dégage, du moins, à la lecture d’un échange de 1981, quoique Simon énonce initialement, avec mesure, sa critique de l’idée d’un « progrès » en art :

Or, s’il y a un domaine où il est impossible de parler en termes de progrès, c’est bien celui de l’art. […] Cela dit […], il est indéniable que dans une période historique récente, très courte […], se sont produits dans l’art une série de phénomènes qui ont constitué […] une des plus formidables ruptures que l’on ait connues avec tout ce qui avait précédé. […] [C]e n’est certainement pas par hasard que, presque simultanément, Joyce, Proust et Kafka en littérature, Cézanne, Van Gogh et le douanier Rousseau en peinture, Gaudi en architecture, […] ont, chacun de leur côté, écrit, peint, construit et composé des œuvres après lesquelles plus rien de valable n’a pu être tant soit peu « comme avant6 ». [Je souligne7].

Cette vision selon laquelle il serait, à une certaine époque, impossible de créer « comme avant », pourrait donner à croire qu’une coupure nette sépare, aux yeux de l’auteur, cet avant d’un après. Simon écrit, par exemple, en 1980, que Proust « innove radicalement en ouvrant au roman des perspectives entièrement neuves et par quoi il s’avère être […] l’un de ces novateurs après lesquels les choses “ne peuvent plus jamais être comme avant8” ». De même, le romancier perçoit une « cassure » découlant de ce moment où peintres et écrivains auraient commencé à dépeindre leurs impressions du monde, plutôt que le monde lui-même (DS, p. 899).

La manière dont Claude Simon expose son rapport à l’aventure du Nouveau Roman est, elle aussi, traversée d’expressions évoquant une discontinuité9. Par exemple, le romancier observe en 1973 que, si les acteurs du Nouveau Roman n’étaient pas « d’accord du tout quand il s’agissait de définir ce que chacun [d’entre eux] voulait faire », ils se rejoignaient lorsqu’il s’agissait de « rejeter un certain nombre de conventions du roman traditionnel10 ». Réaffirmant, en 1985, l’existence de différences majeures entre les conceptions romanesques développées par les acteurs du Nouveau Roman, Simon les réunit autour de ce qu’ils ont eu en commun : « un même rejet », une même répugnance devant « le roman traditionnel » et « ses formes sclérosées11 ». Nelly Wolf avance, d’ailleurs, que « [l]a nouveauté, le refus de l’ancien, la rupture avec la tradition sont les seuls traits constitutifs, […] de l’identité de groupe du Nouveau Roman12. »

Rompre (avec les épigones attardés) – Si la façon dont le romancier décrit son rapport à ses prédécesseurs paraît donc bel et bien évoquer un clivage entre deux étapes de l’histoire du roman, il semble que cette rupture concerne moins un certain roman du passé qu’un certain regard sur le roman qui serait contemporain à Simon. Katerine Gosselin décèle fort justement cette nuance, notamment lorsqu’elle commente un entretien où Simon admet que les excès qu’il associe au roman traditionnel sont « surtout le fait de son interprétation par une certaine critique abusée […] par des déclarations irréfléchies de Balzac13 ». Elle remarque :

L’ennemi est nommé : ce n’est pas le roman lui-même, mais « une certaine critique » qui en fait une interprétation illégitime. Le roman, même réaliste, en vertu de l’écriture qui est son matériau, instaure toujours, plus ou moins parfaitement, une réalité qui lui est propre, et qui outrepasse sa visée didactique initiale. Ainsi, lorsqu’il parle du roman traditionnel et du système didactique duquel il veut participer, Simon s’adresserait en fait à une certaine critique qui pose que le roman devrait toujours s’inscrire dans un tel système.

Les nouveaux romanciers disent eux-mêmes rejeter une conception traditionnelle du roman, en réponse à une critique qui impose cette conception en dogme et exclut en son nom le roman « nouveau » du genre romanesque14.

Ainsi, Simon cible moins un groupe d’individus, malgré la nature polémique de certaines de ses interventions15, qu’une conception du roman, traditionnelle ou conventionnelle. Cette vision contre laquelle il livre bataille ne correspond d’ailleurs pas nécessairement à celle que véhiculaient les auteurs auxquels la « tradition » pourrait être associée. En effet, malgré les reproches constants que Simon formule à l’endroit de certains écrivains classiques, Balzac et Stendhal, notamment16, il ne semble pas chercher à critiquer les démarches et conceptions romanesques de ces écrivains du passé, mais plutôt à lutter contre le fâcheux ressassement de celles-ci dans le présent. Cette distinction se manifeste dans un extrait du Discours de Stockholm, où Simon commente l’œuvre de Balzac après avoir relevé (en les désapprouvant) ses aspirations à une « vertu didactique », à l’« enseignement social » :

Hardiment novateur à son époque (ce qu’oublient ses épigones attardés qui, un siècle et demi plus tard, le proposent en exemple), soutenu par un certain « emportement de l’écriture » et une certaine démesure qui le haussaient au-delà de ses intentions, le roman balzacien a ensuite dégénéré pour donner naissance à des œuvres qui n’en ont retenu que l’esprit purement démonstratif. (DS, p. 893)

Simon spécifie en outre que les formes romanesques de Balzac étaient « absolument neuves et propres à Balzac », quoiqu’« étroitement liées à un moment très précis de l’histoire » qui est désormais révolu17. Suivant une voie semblable, dans « La fiction mot à mot », Simon explique – bien qu’il s’y trouve en pleine démonstration du caractère arbitraire de la notion de « couronnement logique du récit » (recourant à l’exemple de La Chartreuse de Parme) – qu’il est loin de rejeter tout ce qui ne concorde pas avec les expérimentations de sa propre écriture :

Tout ceci, bien sûr, ne prétend pas à démontrer que la présentation – ou, si l’on préfère, le montage – de ses divers éléments selon un ordre chronologique soit incompatible avec la qualité d’une fiction. Ce serait aussi absurde que de dire d’une peinture qu’elle ne peut pas être bonne parce qu’elle est figurative. Des romans du type dont je viens de parler, il en est, nous le savons, d’admirables […] [Simon cite Madame Bovary, les romans de Dostoïevski et Le Château, de Kafka].

Ce que je voulais seulement dire, c’est que pas plus un ordre prétendument chronologique qu’une prétendue justesse d’observation et de peinture des caractères ou des mœurs ne peuvent, à aucun titre, constituer un modèle, […] et […] ne sauraient servir de référence pour juger de la bonne qualité ou de la bonne construction (c’est d’ailleurs la même chose) d’un roman18.

L’on comprend ainsi que c’est contre le recours de ses contemporains à des modèles, à des idéaux esthétiques transposés aveuglément du passé au présent qu’en a réellement Simon, ce qui permet d’entrevoir une continuité, à l’œuvre malgré les ruptures, dans son histoire littéraire.

Une tradition dynamique – Dans le Discours de Stockholm, le romancier oppose « les tenants d’une certaine tradition » – ces gens qui tiennent la tradition étant nécessairement les contemporains de Simon, des « puissances de tout ordre dont la plus grande peur est celle du changement » – à ce qu’il appelle « littérature vivante » (DS, p. 889-890). Il relie également les protestations entourant le fait qu’on lui ait attribué le prix Nobel de littérature aux « problèmes qui dans le domaine de la littérature et de l’art opposent les forces conservatrices à ces autres [non pas] “de progrès” […] mais de mouvement » (DS, p. 889). Simon utilise, en 1967, des termes similaires alors qu’il distingue cette fois les traditions, qui sont « répétitions de formes mortes » appartenant à « un folklore immobiliste », « entretenues artificiellement par des forces ou des groupes sociaux conservateurs », et la tradition, qui est, elle, « dynamique » puisqu’elle suppose que les artistes « exist[ent] et [créent] en fonction de la tradition qui [les] a formés et dont [leurs] actions découlent, même – et peut-être surtout – lorsqu’elles prétendent le nier19 ». Sans équivoque, le romancier ajoute : « pour qu’il soit possible de dessiner des moustaches sacrilèges à la Joconde, il fallait qu’auparavant elle ait été peinte » (TR, p. 157).

Ainsi, il n’y aurait pas véritablement, dans la pensée simonienne de l’histoire du roman, rupture radicale entre le passé et le présent, mais, plutôt, continuité à travers (et par) les crises. Comme Simon le souligne dans son Discours de Stockholm, « l’art s’autogénère […] par imitation de lui-même » ; c’est la « fascination du musée » qui nourrit le peintre, de même que « c’est le désir d’écrire suscité par la fascination de la chose écrite, qui fait l’écrivain » (DS, p. 890). Simon rappelle d’ailleurs constamment que si le Nouveau Roman se fonde sur un rejet des modèles anciens, ce mouvement littéraire « ne sort pas de rien » : il ne s’agit pas de « création » (ce terme sous-entendant « ex nihilo »), mais plutôt de « production à partir de quelque chose20 ». Autrement dit, les acteurs du Nouveau Roman n’auraient « fait chacun dans [leur] petit domaine que continuer21 ». Et, si Simon se relie surtout, par de telles prises de position en faveur de la continuité, à des précurseurs dont il reconnaît explicitement l’influence (Proust, Joyce, Faulkner, Kafka, Dostoïevski, par exemple22), son histoire littéraire, où coexistent rupture et tradition, fait tout de même place aux auteurs classiques ou anciens. Ainsi, Balzac lui-même aurait joué « un grand rôle, en introduisant la description dans le roman », contribuant à la « rupture avec le roman du XVIIIe siècle23 ». De même, Simon souligne ouvertement, à certaines occasions, les innovations d’écrivains « traditionnels » :

Ici comme [dans les pays non capitalistes] on propose comme modèles des écrivains dits classiques qui auraient, une fois pour toutes, moulé le roman dans des formes immuables et parfaites.

Proposer en exemple aujourd’hui Stendhal, Balzac et Tolstoï, c’est ne pas comprendre que ce qui fait leur grandeur est d’avoir écrit comme personne ne l’avait fait avant eux et que leur leçon est celle d’une constante insatisfaction des formes déjà découvertes qu’ils rejettent pour en inventer d’autres jusque-là inconnues. (TR, p. 159)

L’« autrement » en mouvement – On peut donc lire, dans les critiques de Simon envers certains écrivains, un recours polémique – voire caricatural24 – à leur figure, à leur œuvre, une stratégie visant à ouvrir la voie à des expérimentations nouvelles dans le roman. Luttant contre des forces qui empêchent l’évolution de ce dernier, le romancier ne commenterait pas réellement la qualité intrinsèque d’œuvres du passé – encore que l’on puisse concevoir que sa situation historique rende à ses yeux certaines formes ennuyeuses25 – pas plus qu’il ne chercherait à démontrer l’existence d’une rupture radicale dans l’histoire du roman. Mireille Calle-Gruber souligne, d’ailleurs, que Simon n’est « ni d’avant-garde ni de tradition », mais que, pour lui, « l’establishment des connaissances et des œuvres équivaut à un arrêt de mort » (IRV, p. 11). Simon est lui-même limpide à ce sujet :

On ne voit pas très bien alors comment il pourrait exister, en art, plusieurs « échelons » [permettant de distinguer une « avant-garde »]. Par exemple un art qui se distinguerait d’un autre comme le gros de la troupe venant occuper le terrain déjà exploré par des éléments partis en éclaireurs. Occuper pour y faire quoi ? Y découvrir quoi ?… L’« exploiter » ? Le mettre en « valeur » ? Ces mots, semble-t-il, parlent d’eux-mêmes. Quant à cette « arrière-garde » dont on a aussi parlé (tout ce vocabulaire a, décidément, une consonance fâcheusement militaire), et qui pense (si l’on peut dire) et écrit avec, en moyenne, cent à cent cinquante ans de retard, usinant des ouvrages dans le « goût ancien » (par exemple, en 1958, dans le « goût » de Laclos, de Stendhal, de Balzac exactement comme Lévitan fabrique du Louis XV ou du Directoire), sérieusement, on ne voit pas très bien en quoi ceux qui la composent ont, même lointain, un quelconque rapport avec l’art26.

Pour Simon, l’art véritable est nécessairement exploratoire. Voilà sa tradition, peu importe l’époque dont il provient. Jamais achevé, il prend des risques, sans quoi il ne peut plus être appelé « art ». Si la notion de modernité, que l’écrivain associe à l’idée de progrès en art (ATB, p. 41), lui fait horreur, c’est qu’à ses yeux la littérature est « vivante27 » ou n’est pas du tout. Simon ne chercherait pas, ainsi, à trouver le « mieux » définitif, ne tenterait pas d’être original à tout prix – « le culte de l’habitude (la répétition) est absurde, celui du nouveau pour le nouveau ne l’est pas moins » (IRV, p. 63-64) –, mais il s’acharnerait à découvrir l’« autrement » (ATB, p. 42-43) qui convienne pour représenter ses impressions actuelles du monde (DS, p. 899).

L’insatisfaction (au présent)

Rien n’est acquis – Qu’est-ce qui justifie, cependant, cette recherche constante de l’« autrement », ces expérimentations et explorations renouvelées, dessinant des « domaines de travail toujours “en crise”, “en révolution permanente” » (IRV, p. 11) ? Comme l’écrit Simon :

[L]’art est, au même titre que la science, un instrument de connaissance, en ce sens qu’il consiste en l’établissement de « rapports ». Il ne peut donc être, de par son essence, que toujours en avant : c’est une permanente insatisfaction, une permanente révolte, une permanente remise en question, un permanent approfondissement du déjà acquis et du déjà connu qui le suscitent (QAG, p. 137).

La création d’œuvres serait possible, au présent, précisément parce qu’il aura été impossible, pour tout prédécesseur, de mettre un terme à la recherche artistique. Dans cette perspective, une partie de l’insatisfaction de l’artiste proviendrait de la nature même de l’art, du moteur invariant de son évolution, de sa « tradition questionnante28 ». Comme Simon le souligne en entrevue, citant Barthes : « le propre de la littérature est d’apporter des questions29 ». La littérature, « toujours en crise », ne serait jamais satisfaite « de l’acquis, des formes ou des valeurs reconnues […] [et les remettrait] constamment en question30 ».

Toutefois, l’inassouvissement des artistes ne découlerait pas seulement du rapport anhistorique, pour ainsi dire, de tout art aux formes de son passé : il se rattacherait aussi à des expériences historiques particulières. D’une part, pour Simon, le désir de chercher d’autres manières de penser le roman résulterait, en partie, des évolutions scientifiques et techniques de son époque. L’apparition des sciences humaines, par exemple, aurait libéré le romancier du souci de l’enseignement moral ou psychologique31. L’art, de même nature que la science, suivrait ainsi une évolution similaire à celle-ci : si le scientifique devient plus sceptique devant l’« intuition géniale », les « interprétations », le « sens de la médecine » ou le « flair », s’en remettant « à des examens mécaniques, biologiques ou chimiques » plus nombreux et plus poussés, l’artiste aussi se montre « plus humble que ses prédécesseurs, plus méfiant » (QAG, p. 138-139).

L’insatisfaction de Simon et de ses contemporains tirerait également sa source des bouleversements sociohistoriques majeurs du XXe siècle. Comme il l’affirme lui-même, « [s]i le surréalisme est né de la guerre de 1914, ce qui s’est passé après la dernière guerre est lié à Auschwitz32 ». À ses yeux, puisque le littéraire et l’histoire sont « inséparables », il n’est pas surprenant que Joyce et Proust, qui n’ont à peu près pas parlé d’histoire, aient bousculé la littérature à un moment où le paysage historique se trouvait lui-même perturbé33. C’est ce que suggère d’ailleurs Wolf lorsqu’elle écrit que le Nouveau Roman aurait « formulé et formalisé [l’]impossibilité de raconter issue de la Seconde Guerre mondiale34 ».

Pour Simon, « L’ère du soupçon » (1950) de Nathalie Sarraute et Le degré zéro de l’écriture (1953) de Roland Barthes seraient le produit d’une époque où « [t]outes les idéologies s’étaient disqualifiées35 ». Dans une conférence de 1993, il relie de façon étroite certains des traumatismes de son siècle au scepticisme qui entoure sa conception du roman :

Il serait trop long (et au surplus cela n’est pas de mon ressort : je ne suis ni sociologue ni historien) de chercher à exposer ici les causes sociales et historiques de cette évolution [de la littérature et du roman], encore accentuée, me semble-t-il, par les abominations (Auschwitz, Goulag) dont ce siècle a été le témoin, et qui ont fait apparaître des plus suspects le vieux discours « humaniste ». Ce que l’on peut peut-être en retenir, c’est que s’est imposé un refus du « sens institué », le refus de ce roman traditionnel toujours bâti sur le mode de la parabole ou de la fable, délivrant un quelconque enseignement, social, moral, religieux, psychologique ou autre36.

L’on voit se manifester une tension dans l’histoire simonienne du roman autour de cette notion d’insatisfaction : elle serait, en un sens, constante – moteur de tout artiste explorant authentiquement l’« autrement », donc soustraite, en quelque sorte, au passage du temps –, mais, elle demeurerait indissociable, en pratique, d’événements historiques, d’expériences contingentes. Et l’art, en permanent questionnement, pourrait changer le monde en modifiant, par ses découvertes, notre relation à celui-ci37, mais son évolution serait à son tour intimement liée aux transformations de la société, de la pensée et du monde.

L’usure des certitudes – Examinant, quoique dans une perspective différente, les rapports que Claude Simon entretient avec l’histoire, Jean-François Hamel observe que le romancier s’attaque moins à la « réalité violente » de celle-ci qu’à la manière dont on en fait une « fable », un « récit trompeur travestissant ce qu’il prétend rendre au jour dans la plus grande transparence », en substituant à « la complexité du temps l’univocité d’un message didactique38 ». À ce propos, Simon souligne lui-même que s’il lui avait été « révélée quelque vérité importante dans l’ordre du social, de l’histoire ou du sacré, il [lui aurait] semblé ridicule d’avoir recours pour l’exposer à une fiction inventée au lieu d’un traité raisonné de philosophie, de sociologie ou de théologie » (DS, p. 898). Ainsi, en partie inhérente à l’art, quoique nourrie par une situation historique particulière, l’insatisfaction devant la conception traditionnelle du roman que décrit Simon découlerait aussi d’une grande méfiance envers l’esprit démonstratif du didactisme39. Simon rappelle d’ailleurs, dans son Discours de Stockholm, ce qui explique qu’à la période historique qui est la sienne, après des bouleversements qui ont ébranlé certitudes et idéologies, le roman ne puisse plus prétendre à un « enseignement social » (DS, p. 893). En effet, il conclut comme suit un récit saisissant où il évoque son expérience de la révolution espagnole, des atrocités de la Deuxième Guerre mondiale, de ses rencontres, de sa maladie et de ses voyages :

[…] je n’ai jamais encore, à soixante-douze ans, découvert aucun sens à tout cela, si ce n’est comme l’a dit, je crois, Barthes après Shakespeare, que « si le monde signifie quelque chose, c’est qu’il ne signifie rien » – sauf qu’il est. (DS, p. 898)

Cette incertitude, cette prudence propre, selon Simon, au roman de son époque, structure en fait toute sa critique de la conception traditionnelle du roman, non pas, tel qu’on l’a vu, comme forme inadéquate au moment de son écriture – puisqu’il a bien fallu que le roman « réaliste » existe, pour manifester ses faiblesses et se « [donner lui-même] la mort » (DS, p. 892 et 894) –, mais comme modèle dépassé au XXe siècle. Rappelons ses attaques récurrentes contre celui-ci : Simon relie « l’usure d’un certain roman » au fait qu’il relègue la description (opposée à tort à l’action) au second plan40, mais il critique aussi une écriture romanesque trop « morale », semblable en cela à la « fable » (DS, p. 89541), conçue comme un « compte-rendu42 » ou se donnant comme expression d’une théorie43. Lorsqu’on les considère dans leur ensemble, les reproches formulés par Simon, à première vue contre le roman traditionnel, partagent la même cible : une conception du roman selon laquelle un sens préexisterait en quelque sorte à l’écriture44. Le renversement, par Simon, de cette hiérarchie peut trouver des échos dans sa vision de l’histoire littéraire puisque, pour lui, l’artiste voulant « laiss[er] [sa] marque » doit œuvrer « au mieux dans [le domaine] qui [lui est propre] […] sans se soucier d’aucune autre considération45 », politique ou sociologique, sans chercher à transmettre message ou morale.

Le présent de l’écriture – Pour Simon, l’écriture est nécessairement inscrite dans le présent46 : il s’agit moins de décrire des événements passés qu’« un paysage intérieur », l’écrivain ne pouvant se targuer de détenir une vérité, mais racontant plutôt les choses telles qu’elles surgissent au moment de l’écriture (DS, p. 898-900). Tout romancier se trouve aux prises avec des incertitudes et des déformations dont il doit tenir compte, lesquelles découlent de sa perception déficiente, de sa mémoire sélective, mais aussi de sa rencontre avec le langage qui, déjà chargé d’images, transforme ce qu’il cherche à dire47. Selon Simon, un roman porte donc toujours – que l’écrivain l’admette ou non – sur la seule chose dont ce dernier peut parler avec un peu d’autorité : son expérience du présent de l’écriture (DS, p. 898). Il s’explique en entrevue :

Tout ce qu’on peut écrire c’est non pas le monde extérieur mais sa projection en nous. […] On ne fait jamais que son propre portrait. […] [A]près avoir réfléchi, je ne pense plus qu’on puisse « reconstituer » quoi que ce soit. Ce que l’on constitue c’est un texte et ce texte ne correspond qu’à une seule chose : à ce qui se passe dans l’écrivain au moment où il écrit48.

Une autre tension apparaît alors : un peu comme c’était le cas pour la notion de tradition de la rupture, l’idée simonienne du présent de l’écriture soustrait en quelque sorte le geste d’écriture à l’écoulement du temps, puisque celui-ci se déroulerait toujours dans un présent qui absorbe la masse formée par le passé, les souvenirs, l’imaginaire et l’émotion :

[I]l ne s’agit pas du tout de traduire du temps, de la durée, mais de rendre du simultané. […] En littérature, le problème est […] de transposer d’une dimension dans une autre : traduire dans la durée, dans le temps, des images qui dans la mémoire coexistent49.

À la tradition de la rupture répondrait, d’une certaine manière, le présent de l’écriture, deux concepts qui génèrent une friction entre une singularité inscrite dans l’histoire et une certaine permanence. Ils impliquent en effet que, bien qu’une œuvre naisse au présent, d’une perpétuelle insatisfaction, elle demeure alimentée par le passé, un passé transformé par les écrivains, dont ils se distinguent et s’inspirent. De surcroît, la notion de présent de l’écriture relie paradoxalement la conception de l’écriture romanesque simonienne à celle d’auteurs du passé. Le romancier cite presque systématiquement l’exemple de Stendhal – dont il récuse pourtant, au XXe siècle, la valeur de modèle littéraire – lorsqu’il essaie d’expliquer cet état auquel arrive l’écrivain qui travaille50. Il raconte en effet que Stendhal, tentant de faire le récit de son passage réel du col du Grand-Saint-Bernard avec l’armée d’Italie dans Vie de Henry Brulard, se serait demandé s’il ne décrivait pas, plutôt que son souvenir de l’événement, une gravure vue depuis (DS, p. 898-899). Simon utilise cette anecdote pour appuyer son idée : l’écrivain « ne décrit pas un événement passé mais un événement présent » ; il dépeint « de façon plus ou moins consciente » – et malgré ses intentions initiales –, « ce qui est dans son esprit au moment précis où il écrit51 ».

Aux yeux de Simon, même le roman réaliste (celui de Stendhal ou de Balzac), aurait mené ces écrivains à ressentir la perte de contrôle propre au présent de l’écriture, l’emportement que Simon emprunte à Barthes52. Cet état d’esprit singulier, inhérent au travail de tout écrivain, qui suppose une attention particulière au langage, agit ainsi comme un autre vecteur de rattachement de l’histoire littéraire simonienne au passé. En effet, pour Simon, le langage n’est pas « une espèce de chose inerte, de chose morte », mais il constitue « une véritable structure, […] une véritable connaissance du monde53 ». C’est en cessant de chercher à organiser les événements qu’ils racontent selon une logique, psychologique ou sociologique, d’ailleurs douteuse, en ne tentant plus de démontrer, que les écrivains arriveraient à être plus attentifs au passé qui est inscrit dans le langage. Et, de cette manière, ce dernier – qui est, après tout, « le produit de l’expérience, de la connaissance humaine54 », qui « “parle déjà avant [chaque être humain]” » (DS, p. 900) – serait libre de « dépli[er] ses propres lignes de force55 ».

Le présent continue

Recommencer – Aux prises, au présent, avec une masse d’information provenant entre autres du passé du langage et de celui de l’art, Simon voit bien le danger de ne recevoir du monde « qu’une traduction codée, nourrie de formes conventionnelles et usées », de « déjà dit56 ». Pourtant, à ses yeux, le romancier véritable, loin d’être écrasé par l’« asphyxiante culture », est en mesure de l’intégrer, « de la nier (ou plutôt d’y ajouter57…) ». On constate ainsi que l’histoire simonienne du roman accorde une place importante, malgré certaines prétentions à la rupture, au passé. Alimenté par les travaux de ses prédécesseurs, mais ancré dans le présent, l’écrivain participerait à un « constant renouvellement » en trouvant des façons de montrer que tout n’a pas déjà été dit (IRV, p. 74) puisqu’en art « rien n’est jamais résolu – et heureusement, car alors, tout s’arrêterait58 !… » Pour Simon, c’est entre autres parce que l’écrivain découvre – chaque fois de façon différente – devant ses romans terminés, « qu’il y avait mieux à faire », qu’il pouvait faire autrement, qu’il décide de « recommenc[er] à écrire59 ».

Absorbé par le présent de l’écriture où se négocient des rapports à la fois conflictuels et nourriciers avec le passé du roman et de l’art, Simon se dit peu préoccupé de sa postérité future : « le temps (pourquoi chercher à devancer ses jugements ?) se charge […] de faire le tri60 », « tôt ou tard, d’une manière ou d’une autre, l’Histoire (ou l’espèce humaine) reconnaîtra les siens61 ».

De toute façon, l’avenir est assuré, puisque le présent continue :

Je ne peux donc que me contenter de souhaiter que [mon œuvre] prenne place dans l’histoire, et elle n’y prendra place que si elle relève de la dimension de l’art, c’est‐à‐dire dans la mesure où elle aura apporté des formes neuves participant de et à l’incessante transformation du monde62.

Bibliographie

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  • CALLE-GRUBER, Mireille, Claude Simon. L’inlassable réancrage du vécu, Paris, Éditions de la Différence, 2011, 100 p.
  • CALLE-GRUBER, Mireille [dir.], Les Triptyques de Claude Simon ou l’art du montage, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2008, 216 p.
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  • Cette page a servi de source pour les extraits cités des textes suivants
    • AESCHLIMANN, Jean-Christophe et Claude SIMON, « Rencontre avec Claude Simon. “La véritable littérature ne sert à rien” », Écriture, no 48 (automne 1996), p. 214­222.ALLARD, Rolland, Marianne ALPHANT et Claude SIMON, Claude Simon, entretien filmé, série Océaniques : Les hommes-livres, La Sept/INA, 1988.
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Notes de bas de page

  1. Claude Simon, Discours de Stockholm, dans Œuvres, t. 1, Paris, Gallimard (Bibliothèque de la Pléiade), 2006, p. 885-902. Désormais, les renvois à ce texte seront indiqués, dans le corps du texte, par le sigle DS.
  2. Vincent Debaene, « Le point de vue de l’indigène ou comment on écrit l’histoire de la littérature », The Romanic Review, vol. 100, nos 1-2 (2009), p. 17.
  3. Ludovic Janvier et Claude Simon, « Réponses de Claude Simon à quelques questions écrites de Ludovic Janvier », initialement publié dans Entretiens, no 31 (1972), p. 15-29 et repris dans Association des lecteurs de Claude Simon, [en ligne]. http://www.associationclaudesimon.org/claude-simon/entretiens/article/entretien-avec-ludovic-janvier [Site consulté le 6 novembre 2017] ; voir aussi, par exemple, Marianne Alphant et Claude Simon, « La route du Nobel », Libération, 10 décembre 1985, p. 28.
  4. Claude Simon, « L’absente de tous bouquets » (1982), dans Quatre conférences, Paris, Minuit, 2012, p. 42. Désormais, les renvois à ce texte seront indiqués, dans le corps du texte, par le sigle ATB. Voir aussi, par exemple, Charles Haroche et Claude Simon, « Claude Simon. Romancier », L’Humanité, 26 octobre 1981, p. 15 ; enfin, lire, à ce sujet, DS, p. 889-890.
  5. Simon alterne entre ces termes quoiqu’il affirme, dans Ludovic Janvier et Claude Simon, « Réponses de Claude Simon à quelques questions écrites de Ludovic Janvier », art. cit. : « Bien sûr, dans les romans que j’appellerais non pas traditionnels (comme l’a dit Harold Rosenberg, la tradition en art c’est « la tradition du nouveau ») mais plutôt conventionnels […] ».
  6. Charles Haroche et Claude Simon, « Claude Simon. Romancier », artcit., p. 15.
  7. À moins d’indication contraire, c’est moi qui souligne dans les passages cités.
  8. Claude Simon, « Le poisson cathédrale » (1980), dans Quatre conférences, opcit., p. 36.
  9. Voir Katerine Gosselin, « Claude Simon et le roman “nouveau” », dans Paul Dirkx et Pascal Mougin [dir.], Claude Simon : situations, Lyon, ENS Éditions, 2011, p. 69-85, parag. 5, [en ligne]. http://books.openedition.org/enseditions/825 [Site consulté le 6 novembre 2017].
  10. Raymond Osemwegie Élaho, Entretiens avec le Nouveau Roman, Sherbrooke, Éditions Naaman, 1985, p. 54.
  11. Marianne Alphant et Claude Simon, « La route du Nobel », artcit., p. 28.
  12. Nelly Wolf, Une littérature sans histoire. Essai sur le Nouveau Roman, Genève, Librairie Droz, 1995, p. 52.
  13. Katerine Gosselin, « Claude Simon et le roman “nouveau” », artcit., parag. 14-16 (Gosselin cite, en soulignant elle-même, Monique Joguet et Claude Simon, « Entretiens avec Claude Simon », entretiens réalisés en 1976, L’en-je lacanien, vol. 1, no 8 (2007), p. 184) ; voir aussi Katerine Gosselin, « Le roman selon Claude Simon », 18 novembre 2010, dans TSAR (Travaux sur les arts du roman – Université McGill), Le roman selon les romanciers, Montréal, Université McGill, [en ligne]. http://tsar.mcgill.ca/bibliographie/Claude_Simon:dossier [Site consulté le 6 novembre 2017].
  14. Katerine Gosselin, « Claude Simon et le roman “nouveau” », artcit., parag. 15-16 (elle souligne).
  15. Katerine Gosselin, « Claude Simon et le roman “nouveau” », artcit., parag. 3-4, 9 et 24.
  16. Voir, par exemple, Mary Orr, Claude Simon. The Intertextual Dimension, Glasgow, University of Glasgow French and German Publications, 1993, p. 88-97.
  17. Ludovic Janvier et Claude Simon, « Réponses de Claude Simon à quelques questions écrites de Ludovic Janvier », art. cit. ; voir aussi Katerine Gosselin, « Claude Simon et le roman “nouveau” », artcit., parag. 39.
  18. Claude Simon, « La fiction mot à mot » (1972), dans Œuvres, opcit., p. 1187-1188.
  19. Claude Simon, « Tradition et révolution » (1967), dans Mireille Calle-Gruber [dir.], Les Triptyques de Claude Simon ou l’art du montage, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2008, p. 157. Désormais, les renvois à ce texte seront indiqués, dans le corps du texte, par le sigle TR.
  20. Francine Mallet et Claude Simon, « Entretiens radiophoniques avec Francine Mallet », diffusé sur France Culture, 15 mai 1971 ; Mireille Calle-Gruber, Claude Simon. L’inlassable réancrage du vécu, Paris, Éditions de la Différence, 2011, p. 79. Désormais, les renvois à ce texte seront indiqués, dans le corps du texte, par le sigle IRV.
  21. Roland Allard, Marianne Alphant et Claude Simon, Claude Simon, entretien filmé, série Océaniques : Les hommes-livres, La Sept/INA, 1988 ; voir aussi Katerine Gosselin, « Claude Simon et le roman “nouveau” », artcit., parag. 22.
  22. Voir, notamment, Claude Simon, « Écrire » (1989), dans Quatre conférences, opcit., p. 78-79 ; Mary Orr, Claude Simon. The Intertextual Dimension, opcit., p. 6-7.
  23. Jean-Christophe Aeschlimann et Claude Simon, « Rencontre avec Claude Simon. “La véritable littérature ne sert à rien” », Écriture, no 48 (automne 1996), p. 216-217 ; voir aussi Claud DuVerlie, James Rodgers et Claude Simon, « The Novel as Textual Wandering: An Interview with Claude Simon », Contemporary Literature, vol. 28, no 1 (printemps 1987), p. 2 : « All art is innovation, a breaking with earlier breakthroughs. Balzac broke all the rules of the novel that were current when he wrote; Proust, Joyce, Kafka broke all the rules of the Balzacian novel ».
  24. Voir, par exemple, Mary Orr, Claude Simon. The Intertextual Dimension, opcit., p. 104-105, 202 : selon Orr, Simon a parfois tendance à la généralisation lorsqu’il s’agit de décrire l’évolution des courants littéraires.
  25. Voir Claude Simon, « Écrire » (1989), dans Quatre conférences, opcit., p. 82-86, où le romancier précise que certains romans « traditionnels » lui donnent l’impression qu’on le prend « pour un imbécile », ce qui entraîne son désintérêt.
  26. Claude Simon, « Qu’est-ce que l’avant-garde en 1958 ? » (1958), dans Mireille Calle-Gruber [dir.], Les Triptyques de Claude Simon ou l’art du montage, opcit., p. 137. Désormais, les renvois à ce texte seront indiqués, dans le corps du texte, par le sigle QAG. Voir aussi Katerine Gosselin, « Claude Simon et le roman “nouveau” », artcit., parag. 29.
  27. Claude Simon, « Écrire » (1989), dans Quatre conférences, opcit., p. 81 (il souligne).
  28. Claude Simon, « Laissez la culture tranquille ! » (1986), dans Mireille Calle-Gruber, Claude Simon. L’inlassable réancrage du vécu, opcit., p. 89.
  29. Mireille Calle-Gruber et Claude Simon, « Claude Simon : dans l’arc du livre il y a toute la corde », Nuit blanche, magazine littéraire, no 74 (1999), p. 56 ; voir aussi Claude Simon, « Laissez la culture tranquille ! » (1986), dans Mireille Calle-Gruber, Claude Simon. L’inlassable réancrage du vécu, opcit., p. 89.
  30. Claude Simon, « Problèmes que posent le roman et l’écriture », discours initialement prononcé en 1989, Francofonia, vol. 10, no 18 (printemps 1990), p. 9­10.
  31. Charles Haroche et Claude Simon, « Claude Simon. Romancier », artcit., p. 15.
  32. Marianne Alphant et Claude Simon, « “Et à quoi bon inventer ?” », Libération, 31 août 1989, p. 25.
  33. Jean-Claude Lebrun et Claude Simon, « Claude Simon : parvenir peu à peu à décrire difficilement », L’Humanité, 13 mars 1998, p. 18-19.
  34. Nelly Wolf, Une littérature sans histoire. Essai sur le Nouveau Roman, opcit., p. 210. 
  35. Marianne Alphant et Claude Simon, « “Et à quoi bon inventer ?” », artcit., p. 25 : « Ce n’est pas pour rien que Nathalie Sarraute a écrit “L'[è]re du soupçon” ; Barthes, Le [d]egré zéro de l’écriture. Que des artistes comme Tapies ou Dubuffet sont partis des graffitis, du mur, ou que Louise Nevelson a fait des sculptures à partir de décombres. Toutes les idéologies s’étaient disqualifiées. L’humanisme, c’était fini. Sans doute était-ce ce que je ressentais confusément quand je faisais ces dessins très exacts : il n’y a plus de recours, essayons de revenir au primordial, à l’élémentaire, à la matière, aux choses. Exemple : Ponge. » ; voir aussi Roger-Michel Allemand, « Claude Simon pour tout vestige », Babel, no 27 (2013), parag. 1-5, où Allemand remarque que « [l]a corrélation esthétique entre la Solution finale et la nécessité des formes d’expression contemporaines paraît si importante à Simon, si capitale, déterminante, qu’il y revient plusieurs fois », citant encore, ailleurs, l’exemple de Sarraute et de Barthes ; voir enfin Cécile Yapaudjian­Labat, « L’humanisme en question chez Claude Simon », dans Paul Dirkx et Pascal Mougin [dir.], Claude Simon : situations, opcit., p. 103-116, parag. 10-15.
  36. Claude Simon, « Littérature et mémoire » (1993), dans Quatre conférences, opcit., p. 116-117.
  37. Claude Simon, « Littérature et mémoire » (1993), dans Quatre conférences, opcit., p. 106-108 : Simon explique qu’on reçoit une traduction codée du monde, notamment par l’art et les livres.
  38. Jean-François Hamel, Revenances de l’histoire, Paris, Minuit, 2006, p. 180-181.
  39. Voir, notamment, à ce sujet, Mary Orr, Claude Simon. The Intertextual Dimension, opcit., p. 94.
  40. Claude Simon, « Littérature et mémoire » (1993), dans Quatre conférences, opcit., p. 117-119 ; voir aussi Claude Simon, « Le poisson cathédrale » (1980), dans Quatre conférences, opcit., p. 13-14 ; Jean Ricardou [dir.], Claude Simon : analyse, théorie, Paris, Union générale d’éditions, 1975, p. 409.
  41. Voir aussi Jean Ricardou [dir.], Claude Simon : analyse, théorie, opcit., p. 412.
  42. Claude Simon, « Écrire » (1989), dans Quatre conférences, opcit., p. 89.
  43. Raymond Osemwegie Élaho, Entretiens avec le Nouveau Roman, opcit., p. 62-63 ; voir Claude Simon, « Littérature et mémoire » (1993), dans Quatre conférences, opcit., p. 101 ; voir également, pour nuancer, Jean Ricardou [dir.], Claude Simon : analyse, théorie, opcit., p. 404, où Simon précise qu’il trouve fertile le « va-et-vient d’échanges » entre pratique et théorie, quoiqu’il préfère substituer « réflexion » à ce second terme.
  44. Voir Claude Simon, « Écrire » (1989), dans Quatre conférences, opcit., p. 90 ; voir aussi Katerine Gosselin, « Claude Simon et le roman “nouveau” », artcit., parag. 18.
  45. Claude Simon, « Le rôle amoral de la culture » (1988), dans Mireille Calle-Gruber, Claude Simon. L’inlassable réancrage du vécu, opcit., p. 96.
  46. Voir Roger-Michel Allemand, « Claude Simon pour tout vestige », artcit., parag. 14.
  47. Alain Veinstein et Claude Simon, « J’ai appris à écrire dans Joyce et dans Faulkner », diffusé à l’émission « La nuit sur un plateau », France Culture, 8 février 1988, à partir de 54:30.
  48. Bettina L. Knapp et Claude Simon, « Interview avec Claude Simon », Kentucky Romance Quarterly, vol. 16, no 2 (1969), p. 182 ; voir aussi Claude Simon, « Littérature et mémoire » (1993), dans Quatre conférences, opcit., p. 111-113.
  49. Madeleine Chapsal et Claude Simon, « Entretien avec Claude Simon », L’Express, 10 novembre 1960, p. 30 ; voir aussi, à ce sujet, Claud DuVerlie, James Rodgers et Claude Simon, « The Novel as Textual Wandering: An Interview with Claude Simon », artcit., p. 4.
  50. Voir, par exemple, Claude Simon, « Littérature et mémoire » (1993), dans Quatre conférences, opcit., p. 104-105 ; DS, p. 898-899 ; voir aussi Monique Joguet et Claude Simon, « Entretiens avec Claude Simon », artcit., p. 177 ; voir Mary Orr, Claude Simon. The Intertextual Dimension, opcit., p. 90-91.
  51. Claude Simon, « Littérature et mémoire » (1993), dans Quatre conférences, opcit., p. 104-105 (il souligne).
  52. Monique Joguet et Claude Simon, « Entretiens avec Claude Simon », artcit., p. 184 et, dans la même perspective, p. 179-180 ; voir aussi ATB, p. 49 ; voir Katerine Gosselin, « Claude Simon et le roman “nouveau” », artcit., parag. 38.
  53. Raymond Osemwegie Élaho, Entretiens avec le Nouveau Roman, opcit., p. 55.
  54. Raymond Osemwegie Élaho, Entretiens avec le Nouveau Roman, opcit., p. 55.
  55. Claude Simon, « Pour qui donc écrit Sartre ? » (1964), dans Mireille Calle-Gruber [dir.], Les Triptyques de Claude Simon ou l’art du montage, opcit., p. 147.
  56. Claude Simon, « Littérature et mémoire » (1993), dans Quatre conférences, opcit., p. 108-111.
  57. Claude Simon, « Littérature et mémoire » (1993), dans Quatre conférences, opcit., p. 108-111 ; voir aussi Claude Simon, « Laissez la culture tranquille ! » (1986), dans Mireille Calle-Gruber, Claude Simon. L’inlassable réancrage du vécu, opcit, p. 85-86.
  58. Claude Simon, « Littérature et mémoire » (1993), dans Quatre conférences, opcit., p. 122.
  59. Jean Ricardou [dir.], Claude Simon : analyse, théorie, opcit., p. 424.
  60. Claude Simon, « La littérature est une fin en soi » (1966), dans Mireille Calle-Gruber [dir.], Les Triptyques de Claude Simon ou l’art du montage, opcit., p. 154.
  61. Claude Simon, « Le rôle amoral de la culture » (1988), dans Mireille Calle-Gruber, Claude Simon. L’inlassable réancrage du vécu, opcit., p. 96-97.
  62. Ludovic Janvier et Claude Simon, « Réponses de Claude Simon à quelques questions écrites de Ludovic Janvier », art. cit.