Matthias Bruggmann. Décentrement et incertitude du regard

Par Sébastien Galland — Guerre et terrorisme

En 2015, le groupe Fox News diffusa sur son site l’intégralité d’une vidéo de propagande montrant le pilote jordanien Maaz al-Kassasbeh brûlé vif dans une cage. D’une durée d’une vingtaine de minutes, cette vidéo débute par un discours en anglais du Roi de Jordanie Abdallah II sur l’engagement d’Amman dans la coalition internationale. Les images laissent place à un titre : Healing the Believers’Chests, qui présente l’exécution du pilote telle une mesure défensive. Maaz al-Kassasbeh fait ensuite le récit du raid auquel il a participé, son propos étant appuyé par des images montrant les cibles visées, les avions de chasse, les destructions de maisons et les cadavres calcinés d’adultes et d’enfants. Dans les cinq dernières minutes, Maaz al-Kassasbeh, en combinaison orange, marche au milieu des décombres, entouré de djihadistes cagoulés et armés. Des images de bombardements et de dévastations mêlées aux sirènes des ambulances et aux paroles des infirmiers accentuent la dramaturgie où l’horreur se nourrit de l’horreur. Les dernières minutes montrent, simultanément au son de ses battements cardiaques, le pilote jordanien dans sa geôle, surveillé par des gardiens qui finissent par y mettre le feu. La victime est filmée en train de se débattre, ses cris sont couverts par un chant, et la vidéo s’achève sur un gros plan de sa tête calcinée. Ces images terrorisantes sont en phase avec les pratiques contemporaines qui privilégient le choc, le sensationnel et l’extrême dans l’art comme dans les médias. Elles participent à la culture du Torture porn, où il s’agit de saturer le visible en montrant des images de destruction — qui sont aussi destruction des images — qui provoquent la sidération[1]. Cette « pornographie du flash[2] » se retrouve lors des attentats terroristes comme ceux du 11 septembre 2001 qui semblent vus par les médias comme un spectacle pyrotechnique visuel et sonore relayé par toutes les télévisions du monde et ceux de Daech qui empruntent à un répertoire d’images tirées des superproductions hollywoodiennes ou des jeux vidéo à la mode[3]. L’imagerie du terrible ne comporte pas de limites, elle se veut radicale et définitive.

Les images de la terreur sont symptomatiques de l’aboutissement des sociétés médiatiques qui associent la dramaturgie de l’information, le voyeurisme de la téléréalité et l’obscénité de la pornographie. Les images de la terreur sont virales, leur vitesse de transmission et de reproduction à travers les blogues, les sites personnels et les messageries privées est telle qu’un contrôle total est impossible. Elles donnent lieu à l’émergence de circuits alternatifs par rapport aux médias traditionnels, comme dans le cas du cyberdjihadisme qui diffuse en temps réel les images des actes terroristes. Pris dans ce réseau globalisé, les journalistes sont souvent cantonnés à une fonction de consultant : ils légitiment après-coup des images apparues sur d’autres canaux que les médias classiques, notamment sur les réseaux sociaux[4]. Ainsi les téléphones portables permettent-ils à ces images, qu’il s’agisse de l’exécution par pendaison de Saddam Hussein, des exactions commises à Abu Graïb ou Bagram, des décapitations de Daniel Pearl ou de Nick Berg en Irak ou au Pakistan, des massacres perpétrés par Daech à Mossoul, ou des attaques au gaz sur les populations civiles syriennes, de se répandre à l’intérieur d’un système dépourvu de toute vérification centralisée, de tout critère d’authentification et de tout code déontologique. Parce qu’elles se dérobent aux voies de l’information instituée, ces images qui circulent largement sur les canaux sont réputées plus fiables et plus crédibles que les photographies publiées dans la presse, jugées fausses ou trompeuses. Et souvent la presse se voit obligée de reproduire ces images, cautionnant à son insu l’imagerie de la terreur[5].

Les images de Daech étant destinées à terroriser le public, les médias occidentaux floutent celles qui montrent des exécutions capitales, tout comme les autorités occidentales bloquent l’accès aux sites djihadistes. Pourtant, il n’est pas nécessaire d’avoir une grande pratique d’Internet pour contourner ces dispositifs, ces images étant accessibles ailleurs sur des sites non occidentaux, quand elles ne sont pas recyclées par la presse d’information autorisée. Interdire ces images est une mesure ponctuelle, mais tôt ou tard elles se rappellent à nous pour nous hanter. Aussi quelle réalité observons-nous quand nous approchons la terreur à partir d’une scénarisation et d’une scénographie qui nous imposent leurs normes, leurs valeurs et leurs critères ? Que faisons-nous lorsque nous regardons ou étudions ces images, qui se situent à la limite du tolérable, quand elles ne l’ont pas déjà franchie ? Que ferons-nous après les avoir regardées ou commentées ? Qui sommes-nous pour les regarder, les analyser et les interpréter ? Ces photos ou vidéos s’adressent à un public pris à témoin par ceux qui exhibent l’horreur et nous forcent à en assumer le poids au point de nous en rendre complices. Dès lors, quel positionnement adopter face à la prolifération des images pathologiquement extorquées, quels sont la distance idoine et le réglage adéquat relativement à cette « passion du réel[6] » qui croit accéder à la vérité par le spectacle de la destruction totale ?

Ces questions rencontrent le travail photographique de Matthias Bruggmann, qui nous invite à nous interroger sur notre responsabilité face aux images de la terreur et face au monde qu’elles dépeignent. Dans Un acte d’une violence indicible[7], le photographe franco-suisse juxtapose des images prises par les téléphones portables des miliciens combattant Daech avec ses propres photographies des zones de combat en Syrie ou en Irak. Par là, Bruggmann problématise la perception occidentale de la photographie de guerre ainsi que les codes du photojournalisme soumis à la pression médiatique. En s’appropriant les images vernaculaires et en les mêlant aux siennes, le photographe ne souhaite pas seulement que nous nous représentions la guerre à travers l’œil du peuple syrien ; il veut aussi questionner la réalité telle qu’elle est perçue par le ou la photographe occidental et telle qu’elle est vécue par les protagonistes du conflit. Désireux de « susciter, chez un public occidental, une compréhension viscérale de la violence intangible qui sous-tend tout conflit »[8], Bruggmann ne dissimule rien des clichés bruts réalisés sur le terrain par des non professionnels. Il en va ainsi de cette image prise en 2015 qu’Abdel Basset al-Rajab, l’émir de la tribu sunnite des Shaitat, conservait dans son portable le montrant l’arme au poing en train de fouler aux pieds un cadavre décapité[9]. En représailles aux massacres perpétrés contre les Shaitat par l’État islamique en août 2014, les miliciens ralliés aux Forces de défense nationale décapitèrent des djihadistes, accrochèrent leurs têtes à des Jeep et les exhibèrent à travers les rues avec une férocité équivalente à celle déployée par les djihadistes eux-mêmes lorsqu’ils exécutèrent, souvent par décapitation, tous les hommes âgés de plus de 15 ans dans le village shaitat d’Abu Hammam, afin de punir la rébellion de la tribu contre Daech avec qui elle s’était d’abord alliée. L’image expose le regardeur à une limite de la représentation, le réel de la terreur ne pouvant ni s’exprimer ni se comprendre. Or c’est ce point de réel qui entraîne précisément la vacillation de nos suppositions morales et de nos certitudes étroites, en nous confrontant à la complexité de la guerre syrienne, à la volatilité des alliances, des ralliements, des enjeux et des causes, et plus profondément à la confusion dans laquelle nous sommes quand nous tentons d’identifier les « amis » et les « ennemis », les « bons » et les « mauvais ». La photographie d’un soldat de l’Armée syrienne libre prise par Berggmann à Babeela en 2015 rappelle que les combattants de ce quartier de Damas, « après plusieurs années à se battre contre le gouvernement », se retrouvèrent à le défendre contre le Front Al-Nosra et l’État islamique[10]. Autre ruse de l’histoire,  ce cliché des hommes du bataillon du Hachd al-Shabi à Tikrit en 2016, qui s’étaient battus contre l’occupation américaine de l’Irak et reçurent un soutien aérien américain durant les combats contre Daech[11]. La juxtaposition des photographies vernaculaires et professionnelles, le croisement de points de vue distincts sur un même phénomène, suggère combien le photographe n’est pas là pour simplifier ou caricaturer la réalité en lui substituant des identités essentialisantes ou des concepts figés. Mais, au contraire, pour compliquer et pour creuser notre relation à cette réalité en nous proposant des images qui ne sont pas immédiatement compréhensibles et qui se présentent telles une ouverture à l’indétermination, et ce, d’autant plus qu’elles ne comportent pas de légendes directement accessibles.

Les cinq articles qui terminent l’ouvrage de Bruggmann prolongent cette complexification. Rania Abouzeid, Nir Rosen, Issam Abdelrahim et Mazen Bilal sont journalistes, mais leur approche des événements diverge. Abouzeid insiste sur la responsabilité du Qatar et de l’Arabie saoudite qui amena les Syriens à devenir « des étrangers les uns pour les autres », la déshumanisation précédant toujours les tueries[12]. Rosen pointe la responsabilité des Occidentaux, plus précisément l’hypocrisie de l’administration américaine qui soutint la rébellion malgré la présence notoire d’islamistes et ferma les yeux sur les exactions commises par les insurgés à l’endroit des civils[13]. L’absence de leaders visibles dans l’opposition et l’incapacité à définir les objectifs du mouvement révolutionnaire, fut une aubaine pour Al-Qaïda et le Daech, qui surent tirer parti des divisions communautaires. Abdelrahim et Bilal expliquent que l’internationalisation du conflit syrien fut une chance pour le régime qui put traiter la crise « comme le résultat de facteurs extérieurs et non comme l’effet de causes internes », et justifier ainsi la répression sur la base de la légalité au nom de la lutte contre le terrorisme et l’islam politique[14]. Du côté des auteurs étrangers au journalisme, Labib Nahhas, en charge des relations extérieures du groupe de rebelles salafiste Ahrar al-Cham, soutient que le conflit syrien « n’a jamais été une guerre civile ou une escalade de violence confuse et équivoque déclenchée par des puissances étrangères ou des éléments extérieurs », ni même « un problème de minorités », mais une réaction prévisible de la population « après plusieurs décennies d’oppression systématique de l’identité musulmane sunnite (les Sunnites représentant près de 80 % de la population syrienne), ainsi que de persécution et de discrimination religieuse haineuse[15]. » Amjad Farkh, qui participa à la formation des premières troupes de l’Armée syrienne libre avant de s’engager dans le secteur de l’humanitaire, attire l’attention sur « la diffusion de l’information par le moyen des réseaux sociaux et l’apparition du journaliste citoyen usant de son téléphone portable et de tel ou tel site en ligne pour montrer les faits directement observés sur le terrain au plus grand nombre possible d’internautes, de lecteurs et d’auditeurs[16]. » Il conclut que « la rédaction de textes ou le montage d’images ne sont plus nécessaires pour rendre compte de l’histoire qui se déroule sous nos yeux[17]. » En témoigne cette photographie de soldats du Hachd al-Shabi, occupés à faire des égoportraits autour de la dépouille d’un combattant présumé de l’État islamiquesur la route entre Shirqat et Zawiyah en Irak[18]. Les articles et les images sont donc affectés d’une marge de variation qui s’immisce dans le processus d’identification. La compréhension est à la fois provoquée et perturbée, sollicitée et empêchée. Les articles et les images proposent une multitude d’identifications possibles du sens de la situation, tout en nous retirant les moyens de déterminer lesquelles sont les plus pertinentes. Ils produisent des significations sans que jamais celles-ci ne deviennent transparentes. L’ouvrage de Bruggmann dégage l’incertitude qui accompagne le traitement des images en soupçonnant leur fiabilité. L’ajournement structurel du sens se veut une critique des identifications idéologiques ou médiatiques de la réalité syrienne, qui ne sauraient prétendre à une validité absolue[19]. La situation de compréhension n’étant plus objectivement assurée, le regardeur et le lecteur devront, à travers l’expérience du décentrement et de la variation du sens de la crise syrienne, décider de quoi il retourne pour eux, acceptant de se détourner de toute herméneutique préétablie par les médias ou les politiques pour élaborer leur propre interprétation.

L’indétermination qui caractérise l’image et le texte contamine également la réalité laquelle peut faire l’objet de toutes les manipulations ou falsifications rétrospectives, dont est capable la propagande de l’appareil étatique syrien. Plusieurs clichés de Bruggmann sont consacrés, en 2013, au tournage de la série Sous le ciel de la patrie du cinéaste syrien Najdat Anzour. Proche du pouvoir de Bachar al-Assad, Anzour montrait « les pires exactions de l’opposition et mettait en scène diverses théories du complot transformées en soap-operas, remaniant ce faisant l’histoire du conflit syrien » à un moment où une série pro-opposition était tournée au Liban par Abeer Esber[20]. En 2017, Anzour débuta la réalisation d’un long métrage relatant « l’histoire d’un photographe occidental qui, avide de récompenses, conspire avec un commandant islamiste pour commettre une attaque au gaz chimique[21]. » Le film a été tourné en anglais « afin d’atteindre un public occidental, et d’exposer les mensonges que les médias ont fait circuler depuis sept ans sur la guerre en Syrie[22]. » Le tournage se déroula à Darayya, un faubourg de Damas frappé par maintes attaques chimiques durant trois ans et demi de siège. Bruggmann a photographié l’acteur Saif al-Din Subaie, qui joue le rôle du photographe occidental, sur le plateau du tournage dans le décor d’une chambre du Fardoss Tower Hotel à Damas en septembre 2017. L’acteur est allongé sur le lit, il nous regarde avec, devant lui, quelques attributs propres à son statut : appareil photographique, téléphone portable, briquet, cigarettes[23]. Le dispositif de mise en abyme qu’instaure Bruggmann suscite un vertige qui résulte dans le renversement de la réalité en fiction et de la fiction en réalité — ce qui rend très incertaine l’identification de la vérité et de la fausseté. L’ambiguïté est accrue par le personnage qui prend à témoin le spectateur, afin de favoriser son implication dans une scène fictive tendant à situer la vérité de l’image photographique dans cette feinte. Fût-elle de guerre ou de terreur, la réalité fait toujours l’objet d’une scénarisation dès l’instant où elle passe par l’objectif photographique qui la structure, la modifie et la stylise pour n’en livrer qu’une représentation déformée et parcellaire, voisine mutatis mutandis des fictions du régime politique. Est-ce là le sens de la photographie montrant en 2017 des figurants jouant une scène d’exécution dans le film d’Anzour entre Mazzeh et Darayya, à un kilomètre du centre de détention de la branche 248 du Renseignement militaire d’où le photographe de la police militaire connu sous le pseudonyme de César extrayait 55 000 photographies représentant environ 11 000 personnes tuées en prison entre 2011 et 2013[24] ? Aussi horrible soit-elle, la photographie n’est pas la réalité. Elle représente un environnement où « la relation entre la perception et la réalité, et la relation entre la réalité et la vérité sont simultanément violentées »[25], sans que la souffrance du peuple syrien ne soit déniée. L’indécision grève la photographie, elle devient l’indécidable et requiert pour être saisie dans sa spécificité et son originalité un temps long : le temps de l’attention supérieure et du doute soutenu, nécessaires à qui veut prendre la mesure d’un conflit lointain géographiquement, mais omniprésent dans les médias. Là où le flux permanent et précipité des images médiatiques suscite une banalisation de la terreur, Bruggmann réintroduit le temps long qui oblige le regardeur à ralentir pour se questionner sur ce qu’il voit et comment il le voit en une position plus distancée et critique qui relève de la probité. Une probité dont l’on se souviendra volontiers qu’elle réside dans l’art de la nuance contre la pesanteur et l’à-peu-près[26]. La dialectique des nuances est le meilleur remède aux thèses qui, prônant le choc des civilisations ou des barbaries, renforcent les violences communautaires.

L’indétermination dans laquelle Bruggmann place le regardeur n’est pas synonyme d’irrésolution et d’indifférence. De même que l’impossible n’est pas le contraire de l’action, mais sa condition (là où il n’y a pas, j’invente, je crée, je fais), de même l’indétermination conditionne la prise de décision du regardeur en tant qu’elle le conduit à se déterminer. L’indécision à laquelle Bruggmann expose initialement le regardeur ne consiste pas à verser dans l’indifférenciation, mais à valoriser l’aptitude à se positionner dans sa différence subjective. Bruggmann s’explique ouvertement : « Ce mécanisme pourrait ressembler, bien qu’on puisse le contester scientifiquement, à ce qui se produit en physique quantique lorsque l’observation change la nature de ce qui est observé. Mon travail sur la Syrie s’inspire de ce présupposé[27]. » Il appartient au regardeur de se positionner face à l’image, en décidant de la nature et de la valeur de ce qu’il est en train d’observer. Le photographe inscrit le regardeur à l’intérieur d’une dialectique entre les images vernaculaires et les images du photojournalisme, et lui demande de se situer dans ce jeu subtil de contaminations, de nuances et de différences parfois infimes. Partant, le regardeur est ramené à sa propre responsabilité non seulement face à l’image, mais aussi et surtout face au conflit syrien. Le dispositif ouvre ici sur une éthique qui oblige chacun à répondre individuellement de ses choix et de ses actes. L’ouvrage de Bruggmann débute par une référence à Primo Levi citant Simon Wiesenthal[28], ce qui revient à identifier le geste photographique à un devoir de mémoire qui concerne aussi le regardeur ou le lecteur dans le rapport qu’ils entretiennent à l’image et à ses usages. Or le devoir de mémoire ne consiste pas à collectiviser la responsabilité, mais à reconduire chaque sujet vers cette responsabilité individuelle qui définit sa place d’homme et dont il ne saurait s’exempter. La collectivisation de la responsabilité détourne chacun de son propre examen individuel, alors qu’il importe pour Primo Levi « de répondre personnellement de ses fautes et de ses erreurs, sinon toute trace de civilisation disparaît de la face de la terre[29]. » Le thème de la violence gratuite valorise une éthique de la responsabilité centrée sur le sujet contre les meurtres de masse commandités par les appareils étatiques. Les meurtres de masse sont une possibilité qui n’est pas à côté de l’humain, mais au-dedans de lui. La violence de propagande suppose l’indifférence à être affecté par ses actes, elle est la suppression de toute implication du sujet et se traduit par le refus de juger, de se prononcer ou de se questionner[30]. Dans ce refus, c’est la liberté de prendre parti, avec les risques que cela comporte inéluctablement qui est mise entre parenthèses. Ne pas diaboliser la violence n’équivaut pas à l’excuser. Banale, la violence n’est pas négligeable. C’est sa banalité qui s’avère sa menace la plus grande, puisqu’il déresponsabilise le sujet sous couvert de bonne conscience, de conformisme ou d’obéissance. Banale, la violence n’est pas non plus excusable, puisqu’il enjoint à chacun de répondre de ses pensées, de ses paroles et de ses actes devant la communauté humaine. Ne pas pardonner, ne pas disculper ou déculpabiliser est la seule position permettant de respecter la dignité de sujet et la seule garantie d’une implication subjective qui soit authentique et non fallacieuse. Cette implication est d’autant plus importante que les appareils étatiques confisquent et falsifient la mémoire à travers des fictions rétrospectives qui retirent aux victimes le sens de leur propre mort. Lors de la présentation du film d’Anzour à Damas en mars 2018, le ministre de la Culture syrien n’hésitait pas à déclarer : « Le film s’inscrit dans la ligne des efforts menées par l’Agence nationale cinématographique qui documente et archive ce qu’il se passe en Syrie depuis le tout début de cette guerre terroriste contre le pays, afin de garder vivantes ces mémoires pour les générations futures[31]. » L’horizon d’indécidabilité duquel ressort l’œuvre de Bruggmann rompt avec la mauvaise foi entretenue par certains médias, pour intimer à chacun la nécessité de s’engager en son âme et conscience face à l’horreur des crimes commis contre les civils. À propos de l’hôpital de Darayya qui prit en charge nombre de victimes des attaques chimiques du 21 août 2013, Bruggmann écrit : « Autant il est nécessaire d’humaniser des monstres, autant il est important de ne jamais oublier la monstruosité de l’humanité[32]. »

Bruggmann ne conçoit pas son art autrement que comme une forme d’engagement, mais un engagement humble, fait d’écoute, de doute et de remise en cause. Il s’agit de bannir la primeur pour raconter respectueusement l’histoire de ceux qui se confient et consentent à dévoiler une part de leur intimité, laquelle toujours comportera une zone de flou. Aussi, de même qu’il ne saurait exister de cloisonnement entre les images du photographe et les images vernaculaires, il n’y aurait pas de dichotomie entre le photojournalisme et la photographie d’art. Les frontières sont poreuses dès l’instant où l’art s’engage dans la représentation de la guerre. Formé à l’école de Vevey, Bruggmann oscille entre l’art contemporain et le documentaire[33]. Il aime à rappeler qu’il possède le même matériel et les mêmes méthodes de travail qu’un reporter sur le terrain, au point de détenir une carte de presse, sans pour autant se confondre avec un photojournaliste. Bien que toutes ses photos soient « compatibles avec le World Press »[34] et que certaines soient publiées dans la presse, Bruggmann tient à les exposer dans des musées pour les installer dans un lieu autre que l’actualité : le lieu propice à l’émergence d’un regard décentré. Il appartient au regardeur de déterminer lui-même où commence l’art, et ce, afin de battre en brèche la supposée pertinence des hiérarchies, des classifications et des catégories usuelles. Le dialogue avec les images vernaculaires questionne la nature des images de l’art, non seulement pour souligner qu’il n’est pas d’art mineur, mais pour établir de surcroît que l’histoire de l’art se nourrit des images de la guerre[35], tout comme le photojournalisme des images de l’art[36]. Des images s’interposant entre nous et la réalité, il est inévitable que la terreur fasse l’objet d’une esthétisation, notamment quand le photojournaliste imprime à la photographie une aura qui est celle de la peinture. Dans le cas de Bruggmann « l’artialisation » obéit à une éthique : elle provoque des effets de distanciation destinés à casser les processus d’identification avec le sujet, et à briser la dimension fusionnelle des images de la terreur. L’artialisation trace des limites au Torture porn. À la question : « jusqu’où photographier ? », Bruggmann rétorque qu’il s’arrête à partir du moment où la violence est faite pour son objectif[37]. Là où le régime de terreur veut imposer et montrer à tout prix, dans une proximité toujours plus obscène et angoissante, le régime éthique choisit l’écart et le détour. Ici, à Idlib en 2013, des enfants fouillent les décombres d’un immeuble détruit par une frappe aérienne pour récupérer des matériaux de construction[38]. Là, à Deir ez-Zor en 2015, une jeune fille traverse calmement la rue peu après qu’un obus de l’État islamique ait touché une maison à quelques mètres[39]. Ailleurs, à Marmarita en septembre 2013, les miliciens chrétiens se délassent dans la piscine de l’hôtel al-Khair alors que plus bas monte la fumée des combats contre les villages sunnites[40]. Et c’est encore dans une piscine que les combattants du Fouj al-Jouan, une unité des forces des Forces de défense nationale, s’égayent à Khan Arnabeh en août 2015 non loin de leur base[41]. La tragédie syrienne est déplacée en dehors de l’image dans un effet de distanciation et de reconstitution mentale. Le photographe recourt à la métonymie, une anecdote ou un détail de moindre importance désignent des éléments plus importants volontairement hors champ. Plutôt que de montrer des civils suffocants sous les attaques au chlore comme le font les médias occidentaux, Bruggmann photographie sobrement les débris d’un baril de chlore lâché depuis un hélicoptère[42]. L’image n’a rien d’emphatique, son intensité est d’autant plus forte. Il emploie également la métaphore, laquelle suppose une transposition de la réalité dans un ailleurs qui décentre la représentation de la guerre, comme lorsqu’il photographie à Reef Hama le salon d’une famille favorable au régime, vide de ses occupants et où trône le portrait du commandeur Hafez al-Assad[43], ou qu’il se met en scène dissimulé derrière des rideaux blancs dans une chambre d’hôtel de Damas, penché à une fenêtre vers un spectacle invisible cependant que sont posés dans un coin un sac à dos et un appareil photo[44]. Par là, son travail photographique se distingue des images médiatiques de la terreur, dans la mesure où il adopte une stratégie de l’allusion et de l’élusion qui procède par désaturation de la masse visuelle. L’allusif et l’élusif sont d’autant plus effectifs qu’ils ne se laissent pas réduire et ouvrent à une interprétation indéfinie qui ne piège pas le regardeur, mais lui offre un temps de réflexion critique.

Le pouvoir de sidération qui particularise l’imagerie de la terreur est suspendu par le traitement symbolique auquel le photographe soumet l’image à la faveur d’un écart. Bruggmann procède souvent de façon oblique, privilégiant les biais plutôt que la frontalité, le contournement plutôt que le face-à-face avec l’horreur. Ainsi se tient-il là où l’on n’attendrait pas le reporter de guerre : à Damas, dans un dancing en 2014 où les hommes font défaut, un grand nombre ayant fui le pays pour ne pas être enrôlé dans l’armée, d’autres ayant été blessés ou tués [45] ; dans un théâtre où des jeunes partisans du régime et de l’opposition se rejoignent lors de la représentation d’une pièce en 2012 ; à Homs dans la vieille ville en 2012 où des militants de l’opposition fêtent un mariage[46], quand ce ne sont pas des combattants qui se réunissent pour monter, entre les salves d’obus, une pièce allégorique dans laquelle « un lion (Assad, en arabe…) a perdu sa voix, et maltraite les autres animaux pour essayer de la retrouver[47]. » La guerre n’est présente qu’implicitement, et la diversion adoptée par le photographe s’avère finalement plus dérangeante par son aspect insidieux et secret qu’une plongée directe dans une terreur que l’hypermédiatisation tend paradoxalement à déréaliser. L’humour est aussi un expédient habile pour désamorcer la violence et conjurer cathartiquement l’horreur. Ainsi de cette photographie donnant à voir un policier en charge de la circulation dans la ville de Deir ez-Zor en 2015 : une ville sans voitures en raison de la pénurie d’essence[48] ! Scène digne du théâtre de l’absurde, qui se confondait avec la Syrie tout entière, où les « fonctionnaires continuaient d’être employés, contribuant, à la fois à alimenter l’image d’un État encore fonctionnel et encourageant leur allégeance[49]. » Mais, s’agissant de rompre la fascination de images de la terreur, le procédé le plus efficient réside dans les notices du photographe qui commentent à la fin de l’ouvrage chaque photographie, personnelle ou non. Ces notices ne signalent pas seulement l’immersion de Bruggmann dans l’expérience syrienne, elles nous sortent des séductions de l’imaginaire pour nommer les victimes, relater les circonstances des destructions, des blessures ou des décès, préciser le contexte des actions et la qualité des protagonistes, leur histoire et leur vécu… Pour rédiger ces comptes rendus, Bruggmann a dû s’entretenir avec les divers acteurs en présence, ce qui suppose un dialogue préalable au geste photographique. Une dialectique s’instaure entre l’image et le texte. Le passage au symbolique réintroduit les mots, la terreur et la pulsion de mort se réinscrivent dans l’échange, les images traumatisantes se verbalisent, les pathologies se textualisent, la représentation devient plus abstraite, l’obscène le cède à la pudeur. La nomination évite les effets de sidération propres à la terreur, l’image cesse d’être un piège pour l’œil. Le regard se fait éloigné, le désir de voir exige l’écart. L’ellipse et le détour laissent au regardeur le soin de la découverte, ce qui déclenche une transformation. La symbolisation est une action transformatrice, une perlaboration qui permet au spectateur de composer avec le réel, en un règlement pacifique des conflits. La symbolisation est ici au service d’une communauté de mémoire et de vie, qui se détourne des images fusionnelles de la terreur. Elle promeut une désidération, qui favorise non une présence réelle, mais une présence symbolique, étant entendu que le symbole met de l’absence dans la présence en substituant à la chose la parole, le mot et le signifiant. Peu importe en dernière instance que l’image photographique soit heurtante, si la place du sujet parlant est respectée. À l’opposé, la terreur supprime l’écart pour générer un régime de confusion, qui engloutit le sujet de la parole et le prive de ses outils symboliques[50]. Le Torture porn ne vise qu’à l’incorporation par le regardeur de la terreur, de son pouvoir et de sa violence. Il est au service des entreprises terroristes. Respecter le regard éloigné revient à respecter le sujet regardant ainsi qu’à édifier une place où la parole vivante est à même de circuler et de briser la clôture des identifications. L’éthique de Bruggmann nous enseigne que c’est peut-être moins le contenu de l’image qui est problématique en soi, que l’usage distancié ou fusionnel de la photographie.

Sébastien Galland: Professeur de philosophie en classes préparatoires aux grandes écoles, chargé de cours en Philosophie et Arts plastiques à l’université Paul-Valéry (Montpellier III). Chercheur à l’ENS Lettres et Sciences Humaines de Lyon sur les esthétiques négatives dans l’art ainsi que sur les images de la terreur (Richard Mosse, Wafaa Bilal, Sharif Waked, Kai Wiedenhöfer, Moses Saman).

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Courrier international N° 1427, « Pourquoi il faut montrer l’horreur », 8-14 mars 2018, p. 43-45.

Notes

[1] Laurent Sutter (de), Théorie du Kamikaze, Paris, Presses universitaires de France, 2016, p. 18-30.

[2] Nous empruntons cette expression à L. de Sutter, ibid.

[3] Michel Bounan, Logique du terrorisme, Paris, Allia, 2011, p. 7.

[4] Courrier international, « Pourquoi il faut montrer l’horreur », N° 1427, 8-14 mars 2018, p. 43-45.

[5] Michel Bounan, Logique du terrorisme, op. cit., p. 14.

[6] Alain Badiou, Le siècle, Paris, Seuil, 2005, p. 75-87.

[7] Matthias Bruggmann, Un acte d’une violence indicible, Éditions Xavier Barral/Musée de l’Elysée, Paris, 2018.

[8] Interview donnée par Matthias Bruggmann, Musée de l’Elysée, Lausanne, 2018.

[9] Matthias Bruggmann, Un acte d’une violence indicible, photo n° 56 et p. 220-221.

[10] Op. cit., photo n° 35 et p. 216.

[11] Op. cit., photo n° 59 et p. 222. Le Hach al-Shabi, ou Force de libération populaire, est une milice à majorité chiite intégrée à l’armée irakienne, mais recevant l’aide et les subsides de l’Iran. À la page 220, Bruggmann fait état des solidarités tribales et confessionnelles unissant certaines régions de la Syrie, comme Deir ez-Zor, à des villes irakiennes chiites comme Fallujah, ce qui « fit que beaucoup d’hommes de Deir ez-Zor partirent se battre en Irak, tandis que de nombreux Irakiens, qui s’étaient battus contre les Américains et le gouvernement irakien, trouvèrent refuge à Deir ez-Zor ».

[12] Op. cit., p. 235-241.

[13] Op. cit., p. 243-273.

[14] Op. cit., p. 275-293.

[15] Op. cit., p. 305.

[16] Op. cit., p. 323.

[17] Op. cit.

[18] Op. cit., photo n° 75.

[19] Par exemple les photos n° 46 et 47 montrent que le trafic d’antiquités en Syrie existait bien avant la guerre, et que durant le conflit de nombreuses communautés, des forces d’opposition, et pas seulement l’État islamique, l’utilisèrent comme source de financement à un moment où l’économie s’effondrait et le prix de l’énergie explosait : cf. p. 218.

[20] Op. cit., p. 224.

[21] Op. cit., p. 224-225.

[22] Op. cit.

[23] Op. cit., photo n° 77.

[24] Op. cit., photo n° 93 et p. 227 ; Benjamin Barthe et Stéphanie Maupas, « Le récit de la défection de César, photographe de la barbarie syrienne », Le Monde.fr, 23 janvier 2014 [Site consulté le 20 juillet 2019].

[25] Op. cit., p. 333.

[26] Friedrich Nietzsche, Par-delà bien et mal, §227, Paris, Gallimard, 1987, p. 145.

[27] Interview donnée par Matthias Bruggmann, Musée de l’Elysée, Lausanne, 2018.

[28] Matthias Bruggmann, Un acte d’une violence indicible, p. 1 : « […] les SS trouvaient plaisir à en avertir cyniquement les prisonniers : ‘’De quelque façon que la guerre finisse, nous l’avons déjà gagnée contre vous ; aucun d’entre vous ne restera pour porter témoignage, mais même si quelques-uns en réchappaient, le monde ne les croira pas. Peut-être y aura-t-il des soupçons, des discussions, des recherches faites par les historiens, mais il n’y aura pas de certitudes parce que nous détruirons les preuves en vous détruisant. Et même s’il devait subsister quelques preuves, si quelques-uns d’entre vous devaient survivre, les gens diront que les faits que vous racontez sont trop monstrueux pour être crus : ils diront que ce sont des exagérations de la propagande alliée, et ils nous croiront, nous, qui nieront tout, et pas vous. L’histoire des Lager, c’est nous qui la dicterons’’ ». Primo Levi citant l’ouvrage de Simon Wiesenthal, Les Assassins sont parmi nous, 1967.

[29] Primo Levi, Les naufragés et les respacés, Paris, Gallimard, 1989, p. 174-175.

[30] Hannah Arendt, Eichmann à Jérusalem, Paris, Calman-Lévy, 1972, p. 100 sq.

[31] Matthias Bruggmann, Un acte d’une violence indicible, p. 229.

[32] Op. cit.

[33] Sur cette ambiguïté, voir le débat entre Beaumont Newhall, partisan d’une approche esthétisante et moderniste de la photographie « pure » (Alfred Stieglitz, Ansel Adams, Edward Westion), et Elizabeth McCausland, porte-parole de l’approche plus sociale et anti-moderniste de la photographie documentaire (Berenice Abbott, Lewis Hine, Walter Rosenblum) : Laeticia Barrère, « Dialogues sur la photographie documentaire », Études photographiques, N° 31, printemps 2014, [Site consulté le 25 juillet 2019]. Bruggmann se revendique quant à lui d’Edward Steichen, qui, accompagnant les corps expéditionnaire américain durant la première guerre mondiale, pratiqua la photographie « pure » (straight photography) dont la composition se veut artistique.

[34] Le World press photo est une organisation internationale indépendante basée à Amsterdam qui vise à promouvoir le photojournalisme, et qui récompense chaque année les meilleurs photojournalistes.

[35] Philippe Dagen, Le silence des peintres, Paris, Hazan, 2012, p. 51-80.

[36] Que l’on songe au travail photographique de Georges Mérillon : Veillée funèbre au Kosovo (1990), rapproché de la peinture de Mantegna ou de Rembrandt. Sur ce point : Nathalie Delbard, « Les implicites de la sélection photojournalistique (l’auteur et le diffuseur), Les Carnets du Bal, N° 3, Images en manœuvre éditions, 2012, p. 61-72.

[37] Interview de Matthias Bruggmann, Le Grande Table, France culture, le 8 novembre 2018.

[38] Matthias Bruggmann, Un acte d’une violence indicible, photo n° 12.

[39] Op. cit., photo n° 42.

[40] Op. cit., photo n° 39.

[41] Op. cit., photo n° 65.

[42] Op. cit., photos n° 36 et 37.

[43] Op. cit., photo n° 8.

[44] Op. cit., photo n° 32.

[45] Op. cit., photo n° 30.

[46] Op. cit., photo n° 16.

[47] Op. cit., photo n° 19.

[48] Op. cit., photo n° 55.

[49] Op. cit., p. 220.

[50] Marie José Mondzain, L’image peut-elle tuer ?, p. 51-62.

Guerre et terrorisme

Revue Chameaux — n° 11 — automne 2019

Dossier

  1. Présentation du numéro

  2. Histoire et terrorisme d’après l’œuvre de Fouad Laroui

  3. L’écriture de la concernation : sacrilèges et corps violentés dans Les Tragiques.

  4. De Hans-Jürgen Syberberg à Elem Klimov : combattre « Hitler comme cinéaste »

  5. L’humanisme à l’épreuve : l’œuvre de Lorand Gaspar et le conflit israélo-palestinien

  6. Magie blanche et magie noire : cinéma populaire et terrorisme

  7. Polyphonie narrative et mise en abyme intermédiale des voix dans 11 Septembre mon amour (2003) de Luc Lang

  8. Post-exotisme et terrorisme littéraire : ambiguïté

  9. La structure thématique causale de L’Immeuble Yacoubian : entre frustration et dérive terroriste

  10. Quels régimes de vraisemblance pour les récits romanesques des témoins de la Grande Guerre ?

  11. La crudité littéraire face à la cruauté terroriste. Le cas de Charlie (José Luis Castro Lombilla) et de Carne rota (Fernando Aramburu)

  12. Matthias Bruggmann. Décentrement et incertitude du regard

  13. L’écriture du terrorisme dans la littérature algérienne

  14. Reconquérir l’Histoire par la fiction : la Bataille de Culloden dans la série télévisée Outlander

Hors-dossier

  1. Structures et fonctions du récit de deuil